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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 45

Le mercredi 18 mai 2022
L’honorable George J. Furey, Président


LE SÉNAT

Le mercredi 18 mai 2022

La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.

Prière.


[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le Mois du patrimoine asiatique

L’honorable Patricia Bovey : Honorables sénateurs, je prends la parole pour exprimer ma gratitude envers les immigrants et les Canadiens d’origine asiatique. L’incidence positive de leurs patrimoines culturels sur le Canada et sa compréhension du monde est notable. D’hier à aujourd’hui, les riches cultures asiatiques maintes fois centenaires se sont intégrées à la société canadienne. L’expression artistique, au cœur de toutes les cultures asiatiques, s’incarne dans différentes formes : bronze, céramique, textile, calligraphie, peinture sur rouleau et art contemporain avant-gardiste à deux et trois dimensions. Des œuvres d’art asiatiques inspirantes, dont certaines remontent au IIIe siècle avant Jésus-Christ, sont exposées au Musée royal de l’Ontario et au Musée des beaux-arts du Grand Victoria. Des œuvres de chacun de ces musées ont été présentées dans des publications et des expositions nationales et internationales au fil des décennies.

L’art asiatique inspire depuis longtemps les artistes canadiens. Les artistes canadiens d’origine asiatique ont exprimé leur double identité. Les artistes immigrants d’origine asiatique ont incontestablement enrichi le tissu culturel du Canada.

En 1972, Pat Martin Bates, une artiste de Victoria originaire du Nouveau-Brunswick, a reçu une bourse de 5 000 $ du Conseil des arts du Canada pour retracer le parcours d’Alexandre le Grand. Des miniatures perses, des manuscrits, des structures architecturales, des jardins et des artistes lui ont servi d’inspiration pour créer ses caissons lumineux imprimés, peints et percés explorant les cultures et les liens entre les religions mondiales. Elle a dirigé des échanges d’artistes provenant du Japon, de la Chine et de l’Inde.

Né au Canada, sur l’île de Vancouver, Takao Tanabe est un artiste prodige canadien de descendance japonaise lauréat du Prix du gouverneur général en arts visuels et en arts médiatiques. Hélas, cet artiste de renommée internationale a été témoin du côté sombre du Canada pendant la Seconde Guerre mondiale, puisque sa famille et lui ont été envoyés dans un camp d’internement canadien. Cela dit, il a connu une brillante carrière d’enseignant et de peintre; ses tableaux abstraits et ses paysages grandioses communiquent un rapport unique à la lumière et à l’espace.

Les artistes immigrants viennent de partout en Asie. Aliana Au, qui a suivi sa première formation dans sa région natale du Guangdong, est venue étudier à l’École d’art de Winnipeg en 1974. Ses œuvres reflètent les deux traditions, évoquant une profonde réflexion sur l’interaction culturelle.

L’artiste Gu Xiong, aujourd’hui professeur de beaux-arts renommé de l’Université de la Colombie-Britannique, se trouvait sur la place Tiananmen le jour fatidique du massacre de 1989. Il est venu à Vancouver peu de temps après et ses œuvres ont été exposées partout au Canada.

Jin-me Yoon, l’amie de la sénatrice Martin, a immigré au Canada depuis la Corée. Son art fait l’éloge de la politique canadienne de 1971 sur le multiculturalisme, une initiative qui a permis à sa famille d’immigrer au Canada. Ses contributions à l’art et à l’enseignement sont constamment célébrées.

L’éminent peintre Tad Suzuki, qui habite en Colombie-Britannique, a récemment exposé ses œuvres en solo à Toronto, et ce fut un grand succès.

Chers collègues, trois minutes, c’est trop peu pour communiquer ne serait-ce qu’une mince idée des perspectives, des traditions et de la créativité des artistes d’origine asiatique. Portons tout de même nos regards ici, tout près, sur les tableaux colorés et inspirants de la sénatrice Ataullahjan.

En ce Mois du patrimoine asiatique, je salue la passion, le dévouement et l’intégrité créative de tous les artistes asiatiques. Le Canada s’en trouve enrichi.

Merci.

Le décès de John Honderich, O.C., O.Ont.

L’honorable Donna Dasko : Honorables sénateurs, la lieutenante-gouverneure Elizabeth Dowdeswell, le premier ministre Justin Trudeau et le maire de Toronto, John Tory, étaient là. Ses collègues du Toronto Star et du milieu journalistique étaient là. Sa famille et ses amis étaient là. Mercredi dernier, nous étions 400 de ses amis les plus proches à être réunis au centre-ville de Toronto, naturellement, pour rendre hommage à notre ami, John Honderich, décédé subitement le 5 février 2022.

John aurait adoré cette fête, au cours de laquelle le maire Tory lui a remis la clé de la Ville à titre posthume. Mary Deanne Shears, ancienne rédactrice en chef du Toronto Star, a évoqué l’époque où John partait en croisade à l’intérieur et à l’extérieur de la salle de presse. Gord Cressy, ancien conseiller municipal, a évoqué son enfance aux côtés de John à l’école publique Bedford Park et la façon dont cet enfant issu d’un milieu favorisé a commencé dès son plus jeune âge à se mettre au service de la société.

Robin Honderich, le fils de John, a raconté son enfance aux côtés de sa sœur Emily, l’amour de John pour ses petits-enfants, Sebastian et George, et sa passion pour les gestes grandioses et les récits.

John Honderich a longtemps été le rédacteur en chef et l’éditeur du Toronto Star, le quotidien le plus lu au Canada. Il se consacrait à l’excellence du journalisme et était prêt à en payer le prix. Fervent défenseur de la justice sociale, il a également contribué à l’essor de Toronto et à en faire une ville d’envergure nationale. Il a fait du Canada un bien meilleur pays.

John a commencé sa carrière en 1973 comme copiste de nuit au Ottawa Citizen, apportant aux journalistes et aux rédacteurs la nourriture qu’ils commandaient tard le soir. En 1976, il s’est joint au Toronto Star. Au fil des ans, il a gravi les échelons du journal, passant de journaliste économique à chef des bureaux à Ottawa et à Washington, puis à rédacteur en chef en 1988 et éditeur en 1994. Il a quitté ce dernier poste après une décennie, mais est revenu au journal pour devenir président de son conseil d’administration jusqu’en 2020, quand le journal a été vendu à de nouveaux propriétaires.

Sous sa direction, le Toronto Star a remporté d’innombrables prix — trop pour que je les mentionne tous ici —, et plusieurs de ces prix reconnaissaient que le journalisme peut changer les choses pour le mieux.

Je me rappelle une longue série d’articles dans le Toronto Star où étaient publiées des données provenant de la police de Toronto qui révélaient que les conducteurs noirs étaient bien plus susceptibles que les conducteurs blancs de recevoir une contravention, de se faire amener à un poste de police et d’y être détenus jusqu’au lendemain. Beaucoup de Torontois ont été choqués d’apprendre l’existence de profilage racial, tandis que d’autres ont été surpris que le Star se livre à ce type de journalisme. C’était en 2002, 18 ans avant les manifestations organisées par le mouvement Black Lives Matter en 2020.

John lui-même s’est vu décerner d’innombrables prix et distinctions, comme l’Ordre du Canada. Son grand sourire me manquera. C’était un grand plaisir d’être en sa compagnie pour parler et bavarder de tout et de rien. Nous aurions dû avoir plus de temps. John, tu nous as quittés trop tôt. Repose en paix.

(1410)

Terre-Neuve-et-Labrador

L’honorable Mohamed-Iqbal Ravalia : Honorables sénateurs, une des choses dont je suis le plus fier quand je pense à ma province, Terre-Neuve-et-Labrador, c’est notre sens de l’accueil et notre générosité. C’est l’esprit dépeint dans la comédie musicale Come from Away, une ode à la ville de Gander qui a accueilli presque 7 000 voyageurs coincés dans les heures qui ont suivi les événements du 11 septembre 2001. C’est cet esprit qui m’a permis de construire ma vie, ma carrière et mon foyer dans ma ville bien-aimée, Twillingate, et qui a su illuminer ma vie même dans les périodes les plus sombres et inquiétantes.

Aujourd’hui, je suis heureux de saluer à nouveau ce sens de l’accueil et cette générosité dans ma province. Le 9 mai, M. Andrew Furey, premier ministre de Terre-Neuve-et-Labrador, et M. Gerry Byrne, ministre de l’Immigration, de la Croissance démographique et des Compétences, ont accueilli 166 réfugiés ukrainiens à l’aéroport international de St. John’s. Il s’agissait du premier vol financé par le gouvernement canadien pour les personnes fuyant l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie.

Ce vol, qui est parti de Katowice, en Pologne, représente le fruit du travail du bureau de soutien aux familles ukrainiennes, une initiative du gouvernement provincial qui veille à offrir du soutien à tous les réfugiés pendant qu’ils s’intègrent à leur nouvel environnement. Tous les Ukrainiens qui sont arrivés ont obtenu l’Autorisation de voyage d’urgence Canada-Ukraine qui leur permet de résider et de travailler légalement au Canada pendant une période maximale de trois ans. Les Ukrainiens qui arrivent dans ma province avec ce visa seront aussi couverts par la province pour les soins médicaux et les ordonnances.

Avec l’aide de l’Association for New Canadians, nos nouveaux voisins ukrainiens ont obtenu des logements dans la région de St. John’s et ont reçu de l’aide pour trouver du travail et accéder aux diverses mesures de soutien offertes aux nouveaux arrivants.

Les habitants de Terre-Neuve-et-Labrador sont entrés en contact virtuellement pour offrir un appui communautaire supplémentaire. Par exemple, à St. John’s, Michael Holden a créé un groupe Facebook qui fournit des informations sur le logement et l’emploi ainsi que d’autres renseignements pertinents sur la localité pour aider ceux qui cherchent à fuir la guerre en Ukraine. Le groupe compte plus de 10 000 membres et se décrit comme un nouveau chapitre de Come From Away.

Honorables sénateurs, moi et mes collègues sénateurs de Terre-Neuve-et-Labrador — le sénateur Furey, la sénatrice Marshall, le sénateur Manning et le sénateur Wells — sommes extrêmement fiers de représenter une province qui a accueilli nos nouveaux voisins ukrainiens avec gentillesse et générosité, et qui accueillera toujours ceux qui en ont besoin et qui viennent de loin.

Slava Ukraini. Merci, meegwetch.

[Français]

Le drapeau haïtien

Le deux cent dix-neuvième anniversaire

La Journée mondiale des médecins de famille

L’honorable Marie-Françoise Mégie : Chers collègues, je suis heureuse de partager avec vous aujourd’hui deux événements qui, pour moi, sont très significatifs.

Aujourd’hui, le 18 mai, marque le 219e anniversaire du drapeau haïtien. Les villes de Gatineau et de Niagara Falls ont hissé le drapeau d’Haïti pour souligner la contribution des Haïtiens à l’édification du Canada. De plus, les chutes du Niagara seront illuminées ce soir de bleu et de rouge et, à partir de 21 h 45, la planète entière pourra admirer les chutes bicolores en direct, sur le site Web earthcam.com.

Demain, le 19 mai, sera la Journée mondiale des médecins de famille. Le Collège québécois des médecins de famille souligne ce qui suit : « La relation et la continuité des soins sont l’essence même de la pratique en médecine de famille ».

Malheureusement, au Canada, près d’une centaine de postes de résidents en médecine familiale sont demeurés vacants selon le Service canadien de jumelage des résidents, connu sous l’acronyme CaRMS.

Bien des gens dans ma profession se posent des questions relativement au fait qu’on a de la difficulté à reconnaître les diplômes étrangers. Les examens d’aptitude sont réussis par certains auprès du Conseil médical du Canada, mais malgré cela, les postes en résidence demeurent vacants. Selon l’ancien président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, le Dr Louis Godin, il manque déjà un millier de médecins de famille au Québec. Pour chaque médecin de famille de moins, ce sont 1 000 personnes qui n’auront pas de médecin de famille.

Malgré l’importance de la médecine familiale, la Dre Marie-France Raynault, cheffe du Département de médecine préventive et de santé publique du CHUM, souligne que cette spécialisation demeure sous-valorisée. De plus, certains médias la dénigrent et il manque aussi d’exposition pour les jeunes finissants; comme tout cela a été exacerbé par la pandémie, vous voyez le tableau.

Il s’agit pourtant d’une pratique riche en défis et en accomplissements; si les jeunes finissants le savaient! Le médecin de famille, c’est le spécialiste de toute la personne; c’est là une expression que j’ai empruntée à un de mes mentors, le Dr Gilles Des Rosiers. Étant moi-même médecin de famille immigrante, formée en médecine en Haïti, je vous parle d’expérience. Nul besoin de revenir sur le film La grande séduction pour comprendre l’importance des médecins de famille dans une communauté.

Je fais appel aux instances concernées pour travailler plus fort afin de valoriser la médecine de famille.

Bonne Journée mondiale des médecins de famille et bonne fête du drapeau haïtien à tous les Canadiens et Canadiennes d’origine haïtienne.

Je vous remercie.

Des voix : Bravo!


[Traduction]

AFFAIRES COURANTES

Projet de loi concernant la modernisation de la réglementation

Dépôt du troisième rapport du Comité des affaires étrangères et du commerce international sur la teneur du projet de loi

L’honorable Peter M. Boehm : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le troisième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, qui porte sur la teneur des éléments de la partie 9 du projet de loi S-6, Loi concernant la modernisation de la réglementation.

L’ajournement

Préavis de motion

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que, lorsque le Sénat s’ajournera après l’adoption de cette motion, il demeure ajourné jusqu’au mardi 31 mai 2022, à 14 heures.

Obtenir des résultats dès maintenant pour les Canadiens : une entente de soutien et de confiance

L’impact sur les finances publiques du Canada de l’entente néo-démocrate—libérale—Préavis d’interpellation

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, après-demain :

J’attirerai l’attention du Sénat sur l’impact sur les finances publiques du Canada de l’entente NPD-libérale intitulée Obtenir des résultats dès maintenant pour les Canadiens : une entente de soutien et de confiance.


PÉRIODE DES QUESTIONS

Les finances

Les taxes sur les carburants et sur le carbone

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, le prix de l’essence a atteint le record de plus de 2 $ le litre partout au pays dans les derniers jours, ce qui rend la vie encore moins abordable pour les Canadiens. Monsieur le leader, le lendemain de la conclusion par le premier ministre d’une entente dans laquelle il achetait le soutien du NPD jusqu’en 2025, le gouvernement néo-démocrate—libéral a rejeté à l’autre endroit une motion de l’opposition officielle qui demandait de suspendre l’application de la TPS sur les carburants. Le gouvernement pourrait facilement mettre en œuvre cette mesure qui aurait un effet positif sur la vie et les finances des Canadiens qui ont du mal à joindre les deux bouts.

Maintenant que le prix de l’essence atteint des sommets, le gouvernement ne regrette-t-il pas de ne pas avoir donné un peu de répit aux Canadiens à la pompe en suspendant l’application de la TPS sur les carburants? Est-ce une mesure que le gouvernement néo-démocrate—libéral serait prêt à étudier?

(1420)

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de soulever la question du prix de l’essence, que nous subissons tous chaque fois que nous faisons le plein.

Le gouvernement est toujours disposé à envisager des mesures pour aider les Canadiens durant les périodes difficiles. Je suis persuadé que cette question demeure à l’étude.

Le sénateur Plett : Ce serait bien si le premier ministre faisait à l’occasion le plein de son propre véhicule. Il comprendrait peut-être mieux le problème.

Ce matin, nous avons appris que les prix à la consommation ont augmenté de 6,8 % en avril, d’une année à l’autre, ce qui ne touche pas non plus le premier ministre. En dépit d’une inflation record et d’une crise de l’inabordabilité que vivent les familles canadiennes — et pas le premier ministre —, le gouvernement libéral—néo-démocrate s’est dit le mois dernier que le temps était venu d’augmenter la taxe sur le carbone de 25 % pour l’essence. Cela ne touche pas le premier ministre.

Monsieur le leader, on a demandé au gouvernement de suspendre la taxe sur le carbone pour soulager les Canadiens. Comme je l’ai déjà dit, le gouvernement dispose de toute la marge de manœuvre voulue pour le faire. Il réduirait ainsi le prix de l’essence pour tous ceux d’entre nous qui la payent eux-mêmes, ne serait-ce que pour aller travailler. Pourtant, le gouvernement a refusé de le faire.

Alors que le premier ministre se trouvait en Colombie-Britannique en 2018, on lui a parlé du prix élevé de l’essence. Il a dit que c’est « exactement ce que nous voulons ». À ce moment-là, le prix de 1,60 $ le litre était considéré comme étant élevé.

Monsieur le leader, n’est-il pas vrai que le gouvernement a refusé de prendre des mesures pour réduire le prix de l’essence pour aider les Canadiens simplement parce qu’en réalité, un prix de l’essence élevé, c’est exactement ce que veut le premier ministre?

Le sénateur Gold : La réponse est non.

Je pourrais m’arrêter ici, mais, comme votre question avait un bon préambule, je vais me permettre d’en rajouter un peu. Ce que veut le gouvernement, c’est une approche équilibrée et sensée à long terme pour ce qui est de l’économie et de l’environnement, pour le bien de tous les Canadiens, y compris les générations futures.

[Français]

La justice

Les droits des victimes d’actes criminels

L’honorable Pierre-Hugues Boisvenu : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Le 9 mai dernier, le ministre de la Justice du Canada déclarait ce qui suit, et je cite :

Il est essentiel de veiller à ce que les victimes aient accès aux ressources et à l’information dont elles ont besoin et qu’elles connaissent leurs droits et puissent ainsi mieux se faire entendre dans le système de justice pénale.

Pourtant, les victimes attendent depuis neuf mois qu’on nomme un ombudsman des victimes d’actes criminels afin que leurs droits soient protégés. Depuis sept ans, aucune amélioration n’a été apportée par ce gouvernement à la Charte canadienne des droits des victimes et on attend depuis deux ans la révision législative à la base de cette charte.

En 2016, le projet de loi C-28 abolissait la suramende compensatoire qui finançait les services aux victimes d’actes criminels. En 2017, le gouvernement a voté contre la permanence du poste d’ombudsman. En 2020, la Commission des libérations conditionnelles du Canada a pris un an avant de mettre en place un système de vidéoconférence pour que les victimes puissent assister à la remise en liberté des criminels.

Sénateur Gold, dans le cadre de la Semaine des victimes et survivants d’actes criminels, pouvez-vous indiquer ce que le gouvernement actuel a fait de positif depuis 2015 pour les victimes et pour les droits des victimes d’actes criminels?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de votre question et de votre engagement envers cet enjeu important.

Le gouvernement du Canada est conscient qu’il y a du travail à faire pour améliorer la situation des victimes. Il y a plusieurs mesures qui ont été prises et d’autres qui sont en cours d’élaboration. Aussitôt que les mesures seront déterminées et rendues publiques, je pourrai les annoncer dans cette Chambre.

Le sénateur Boisvenu : Merci, sénateur Gold, pour votre réponse qui n’en était pas une.

Sénateur Gold, votre gouvernement est beaucoup plus actif à améliorer le sort des criminels, et cela se voit si l’on pense au projet de loi C-75 adopté en 2019, et maintenant avec le projet de loi C-5. Ce projet de loi fera en sorte que les crimes graves comme les agressions sexuelles, les enlèvements et la traite de personnes ne seront plus assujettis à des peines d’emprisonnement, mais plutôt à des sentences avec sursis, ce qui veut dire une prison de salon.

Pouvez-vous nous dire, sénateur Gold, quel projet de loi le gouvernement libéral entend déposer pour améliorer les droits des victimes d’actes criminels au Canada?

Le sénateur Gold : Merci de la question.

Je ne suis pas convaincu que la description du projet de loi que nous souhaitons recevoir bientôt pour étude est tout à fait exacte, mais je vais l’ignorer.

Je n’ai pas d’information que je peux divulguer sur les projets de loi à venir, mais aussitôt qu’un projet de loi sera déposé ou rendu public, je vous le laisserai savoir sur-le-champ.

Les transports

La révision de la structure de gouvernance des ports

L’honorable Renée Dupuis : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat. Le 30 avril 2021, durant le comité plénier qui étudiait le projet de loi prévoyant la reprise et le maintien des opérations au port de Montréal, j’ai posé une question au ministre des Transports.

Des représentants du syndicat nous avaient dit que selon eux, la grève avait été déclenchée en réponse à ce qu’ils ont perçu comme de la provocation de la part des employeurs. Ils se sont aussi plaints à deux reprises, dans leur présentation au comité plénier, du fait que les vrais décideurs n’étaient pas à la table des négociations et qu’ils ne parlaient pas avec les bonnes personnes.

Je voulais savoir si le ministre estimait qu’il y avait un élément dans ces difficiles négociations — qui duraient depuis des années — qui touchait plutôt la structure de gouvernance particulière au port de Montréal. Dans sa réponse, le ministre des Transports nous a informés que son ministère était justement en train d’examiner la structure des ports et qu’il étudiait une proposition visant à moderniser la façon dont les ports sont gérés et qu’il cherchait constamment des façons d’améliorer la structure de gouvernance.

Sénateur Gold, pouvez-vous nous dire où en est le ministère des Transports dans son examen de la structure de gouvernance des ports au Canada? Pouvez-vous nous dire quelles consultations ont eu lieu, lesquelles seront à venir et qui y participe? Quel échéancier le ministre s’est-il fixé pour compléter cet examen?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie pour votre question.

J’aimerais souligner l’engagement du ministre des Transports, dans sa lettre de mandat, à diriger les efforts visant à moderniser les ports. Le gouvernement a lancé, comme vous l’avez mentionné, une série de consultations, et il a reçu des commentaires qui ont fait l’objet de documents de travail accessibles au public. Ce travail se poursuit et je tiendrai le Sénat au courant des étapes à venir. Je porterai également votre intérêt pour cette question à l’attention du ministre Alghabra.

La sénatrice Dupuis : Merci pour cet élément de réponse. J’aimerais quand même que vous essayiez d’obtenir l’échéancier du ministre pour régler cette question.

Il y a un examen en cours et des consultations, mais j’aimerais savoir s’il peut déposer la liste des organismes consultés, les commentaires reçus et, surtout, l’échéancier pour compléter l’examen.

Le sénateur Gold : Avec plaisir.

La sénatrice Dupuis : Merci.

[Traduction]

L’environnement et le changement climatique

Le Pacte de Glasgow pour le climat

L’honorable Mary Coyle : Honorables sénateurs, ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

La semaine dernière, pour la première fois depuis la COP26, des dirigeants politiques et des ministres responsables se sont rassemblés à Copenhague pour discuter de la mise en œuvre du Pacte de Glasgow pour le climat. La rencontre des ministres au Danemark a rallumé la flamme de la coopération politique et de l’urgence d’agir par rapport aux engagements de Glasgow. Elle a aussi permis d’établir les ambitions en préparation à la COP27, qui aura lieu en Égypte en novembre.

Sénateur Gold, pourriez-vous nous dire où se situe le Canada par rapport à ses engagements dans le Pacte de Glasgow et aux autres accords conclus à la COP26? Dans quels aspects sommes-nous sur la bonne voie, en retard ou en avance?

(1430)

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je remercie l’honorable sénatrice de sa question.

Le Canada considère les changements climatiques comme un problème mondial qui commande une solution mondiale, comme votre question le laisse entendre, à juste titre.

Le Canada joue donc un rôle de chef de file sur la scène internationale en matière de lutte contre les changements climatiques, notamment en réaffirmant son soutien à l’égard de l’engagement mondial sur le méthane et de son objectif de réduire les émissions de méthane produites par le secteur pétrolier et gazier, et en s’engageant à mettre fin à la déforestation d’ici 2030, entre autres initiatives.

Pour répondre plus précisément à vos questions, je demanderai des précisions au gouvernement, puis j’en ferai rapport au Sénat.

La sénatrice Coyle : Sénateur Gold, le ministre du Climat, de l’Énergie et de l’Approvisionnement du Danemark a dit ceci : « Les pourparlers lors de cette rencontre des ministres ont permis de jeter des bases solides en vue de la COP27, qui se tiendra à Sharm El‑Sheikh, en Égypte. »

Nous sommes maintenant à six mois de la COP27. Pouvez-vous nous dire quelles décisions ont été prises par rapport aux questions qui seront étudiées lors du prochain sommet mondial sur le climat, et quels seront les objectifs prioritaires du Canada lors de ce sommet?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de la question. Je vais tâcher de m’informer également à ce sujet auprès du gouvernement, et j’espère pouvoir fournir une réponse dans les meilleurs délais.

[Français]

L’emploi et le développement social

L’assurance-emploi—Les délais de traitement

L’honorable Diane Bellemare : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, un article a été publié le 11 mai dernier dans La Presse, intitulé « Mieux vaut être riche pour tomber sur le chômage ». Je ne suis pas la seule à parler de ce problème. L’article commençait comme suit :

Avec le taux de chômage à un creux historique, Ottawa ne croule assurément pas sous les demandes d’assurance-emploi. Pourtant, les délais pour obtenir un premier versement peuvent atteindre quatre, voire cinq mois.

L’assurance-emploi a beau être complexe, rien ne peut justifier de tels délais. Selon ce que rapportait La Presse, des fonctionnaires ont même suggéré aux demandeurs de vendre leurs biens pour subvenir à leurs besoins. Cela me semble aberrant.

Je joins ma voix à ceux et celles qui déplorent cette situation. L’assurance-emploi est une assurance, et non un programme d’aide sociale. Les cotisants qui y ont droit ne devraient pas avoir à faire une démonstration d’indigence. Ce problème n’est pas lié non plus à la future réforme de l’assurance-emploi, mais plutôt à l’application de la présente loi.

Quelles sont les mesures d’urgence que le gouvernement compte prendre ou qu’il a prises pour exiger que Service Canada verse les prestations que les chômeurs ont le droit de recevoir dans la dignité dans les délais prescrits, soit 28 jours, et sans devoir appeler leur député?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de souligner cet important enjeu qui touche trop de personnes. Malheureusement, je n’ai pas la réponse à votre question, mais je ferai le suivi auprès du gouvernement et je tâcherai de transmettre la réponse aux sénateurs.

La sénatrice Bellemare : Sénateur Gold, quand aurons-nous l’occasion de nous entretenir avec la ministre Qualtrough au sujet de l’urgence de la réforme de l’assurance-emploi?

Le sénateur Gold : Merci de la question. Comme vous le savez bien, nous nous efforçons d’inviter des ministres à participer à des échanges au Sénat. Cela permet de créer des occasions pour approfondir les enjeux liés aux portefeuilles ministériels.

Je prends note de l’intérêt que vous manifestez à l’égard de ce portefeuille ministériel. Je comprends que vous avez eu l’occasion d’échanger avec la ministre récemment. La ministre demeure engagée auprès du Sénat. D’ailleurs, elle s’est rendue disponible à plusieurs occasions durant la pandémie. Je suis sûr que la ministre se rendra disponible pour comparaître devant le Sénat prochainement.

[Traduction]

Transports et communications

Les travaux du comité

L’honorable Robert Black : Honorables sénateurs, le mercredi, le Groupe des sénateurs canadiens adresse ses questions aux présidents des comités. Par conséquent, j’adresse aujourd’hui ma question à mon honorable collègue le sénateur Housakos, président du Comité sénatorial permanent des transports et des communications.

Sénateur Housakos, avant d’entreprendre l’étude du projet de loi S-6, le Comité des transports et des communications menait une étude sur les impacts du changement climatique sur les infrastructures essentielles. Je crois comprendre que le comité a l’intention de reprendre cette étude.

Comme vous le savez, j’aborde tous les sujets à la Chambre rouge sous l’angle de l’agriculture et de la ruralité. Ma question d’aujourd’hui sera donc axée sur l’expérience rurale que, malheureusement, on oublie trop souvent.

Les 20 % de la population qui vivent dans des communautés rurales, éloignées ou nordiques ont souvent des difficultés à accéder à des infrastructures essentielles de tous types, qu’il s’agisse de transport ou d’accès à une large bande fiable et abordable.

L’écart entre les Canadiens urbains et ruraux s’est creusé encore plus pendant la pandémie de COVID-19. Cette disparité s’exacerbera presque certainement à mesure que le pays continuera de subir les effets du changement climatique et ses répercussions subséquentes sur les infrastructures existantes.

Dans cette optique, pouvez-vous nous dire si le comité prendra en considération la manière dont les infrastructures essentielles des communautés rurales peuvent être touchées par le changement climatique, sachant qu’elles sont confrontées à des problèmes différents de ceux des communautés urbaines?

En outre, pouvez-vous confirmer que les voix des régions rurales seront amplifiées afin de garantir une étude complète qui reflète l’ensemble du Canada?

L’honorable Leo Housakos : Je vous remercie de votre question, sénateur Black. Je vous remercie aussi d’avoir eu la courtoisie de me la transmettre à l’avance.

Je suis heureux de vous dire que le comité a entendu, le 27 avril dernier, le témoignage de la Fédération canadienne des municipalités, la FCM, qui compte plus de 2 000 membres partout au pays.

Pendant son témoignage, le représentant de la FCM a parlé du travail qu’accomplit l’organisme auprès des communautés rurales et de la formation qu’elle offre, à l’échelle régionale, pour aider les petites municipalités à apprendre à utiliser les données climatiques du gouvernement fédéral dans la planification de leurs infrastructures.

Le comité prévoit également inviter des municipalités, notamment des municipalités rurales, à témoigner dans le cadre de cette étude importante.

En vue de ces témoignages, la FCM recommandera des municipalités qui font preuve de leadership dans ce dossier. Je tiens aussi à rappeler que, comme le veut la tradition du Sénat, tous les sénateurs peuvent suivre les travaux du comité et y participer, même s’ils n’y siègent pas régulièrement.

Si vous-même ou d’autres sénateurs avez des témoins à recommander pour cette étude importante, je vous invite à transmettre vos recommandations à notre comité directeur, qui les recevra avec plaisir. Le greffier du comité se servira des suggestions de la FCM et des sénateurs pour planifier la comparution des témoins. Nous avons à cœur, comme toujours, de mener une étude exhaustive et de voir à ce que toutes les régions du pays soient représentées.

[Français]

Le Bureau du Conseil privé

Les nominations par le gouverneur en conseil

L’honorable Claude Carignan : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat.

Monsieur le leader, cette semaine, un reportage de Radio-Canada révélait que, malgré le fait que 30,8 % des employés de la fonction publique sont d’origine francophone, seulement 19 % des postes de sous-ministre et de sous-ministre délégué sont occupés par des francophones. La particularité, c’est que ces postes sont des nominations du Conseil privé et du bureau du premier ministre.

La semaine dernière, au Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise, la commissaire de la GRC est venue témoigner et n’a prononcé aucun mot en français. J’ai fait faire une recherche par la Bibliothèque du Parlement pour savoir si elle avait déjà prononcé un discours ou répondu à des questions en français. Selon les recherches, il n’y avait aucune trace de mots prononcés en français par la commissaire de la GRC. Pourtant, lorsqu’elle a été engagée, il était mentionné, dans le profil du poste, comme exigence linguistique, que la maîtrise des deux langues officielles était préférable. On mentionne aussi, dans la section des langues officielles et de la diversité, que le gouvernement du Canada tient compte du bilinguisme et de la diversité au moment d’évaluer les candidats pour ce poste.

Je ne sais plus comment qualifier le comportement du bureau du premier ministre lorsqu’il dit une chose et fait le contraire. Est-ce normal qu’il y ait une préférence, au Bureau du Conseil privé, pour nommer des personnes non bilingues dans des postes clés?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de la question. Il ne s’agit pas d’une préférence pour nommer des personnes non bilingues. Le choix des candidats dans des postes clés — et je parle des postes que vous venez de décrire — se fait en prenant en considération un amalgame de critères liés à l’expérience, aux compétences, à la disponibilité, à la volonté, etc. La question linguistique est un des facteurs importants, mais pas nécessairement le seul facteur.

Pour ce qui est de l’engagement du gouvernement canadien à l’égard de cet enjeu, il faut souligner que dans la fonction publique, environ 40 % des fonctionnaires sont bilingues. Le gouvernement va de l’avant avec des révisions et le projet de loi C-13. J’espère que nous aurons bientôt l’occasion d’étudier en profondeur le sujet de ce projet de loi, qui représente un pas important pour la protection et la promotion du français et des minorités linguistiques au Canada.

(1440)

Le sénateur Carignan : Vous savez, dans le cadre d’une saine gestion des plans de relève en matière de ressources humaines, on s’assure d’avoir un bassin ou une pyramide plus large vers le bas et qui monte vers le haut. On s’assure de disposer d’un bassin suffisamment important de candidats qui ont les compétences pour remplir les fonctions.

Comment expliquez-vous le fait que le bassin soit composé de 30 % de francophones et qu’au haut de la pyramide, il n’en reste que 19 %? Comment se fait-il que le gouvernement considère que le bassin de francophones a moins de compétences?

Le sénateur Gold : Encore une fois, je n’accepte pas cette caractérisation de la motivation du gouvernement en ce qui a trait aux compétences. Comme je viens de le dire, et je le répéterai, la décision de pourvoir un poste en particulier doit prendre en considération les candidats disponibles qui ont montré leur intérêt et tous les autres critères liés aux tâches du poste en question.

[Traduction]

La Société canadienne d’hypothèques et de logement

L’Incitatif à l’achat d’une première propriété

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Monsieur le leader, aujourd’hui, je vous donne l’occasion d’offrir une meilleure réponse que celle que vous m’avez donnée hier, lorsque je vous ai interrogé sur le manque de détails concernant les changements à l’Incitatif à l’achat d’une première propriété. Le budget présenté le mois dernier ne contient aucun renseignement sur les changements que le gouvernement néo-démocrate—libéral compte apporter à ce programme ni sur la date d’entrée en vigueur de ces changements.

Il s’agit d’une question fort importante pour les Canadiens. L’inflation record du mois d’avril, dont le sénateur Plett a parlé plut tôt, découle en grande partie du coût des aliments et du logement. En fait, Statistique Canada a révélé qu’en avril, le coût du logement a connu la hausse la plus marquée depuis 1983 — il y a presque 40 ans.

Monsieur le leader, quand les Canadiens connaîtront-ils les détails des changements que vous allez apporter à l’Incitatif à l’achat d’une première propriété et quand connaîtront-ils la date d’entrée en vigueur de ces changements?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci de la question et de cette occasion d’améliorer ma réponse, mais je crains de vous décevoir. Je n’ai pas de date à vous donner. Je pourrais m’arrêter là, mais j’ajouterai que je vais me renseigner et vous revenir à ce sujet.

Il est important que les Canadiens comprennent les mesures que le gouvernement a prises pour s’attaquer au dossier complexe de l’abordabilité des logements, qui est en grande partie une question d’offre. Je vais m’en tenir là, mais je serai heureux de répondre à d’autres questions sur les mesures que le gouvernement prend pour travailler avec l’industrie et d’autres ordres de gouvernement pour s’attaquer à ce problème bien réel aux solutions pour le moins complexes.

La sénatrice Martin : Parlant de solutions, j’ai une autre question à vous soumettre. Selon des données publiées lundi par l’Association canadienne de l’immeuble, le prix moyen d’une maison dans le Grand Vancouver a augmenté d’environ 19 % entre avril 2021 et avril 2022. La hausse est encore plus importante dans d’autres régions de la Colombie-Britannique. En effet, pendant la même période, le prix des maisons a augmenté du tiers sur l’île de Vancouver et dans la région de Chilliwack, et de plus de 35 % dans la vallée du Fraser.

Monsieur le leader, hier, vous avez parlé de la création d’un compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété. Comme vous le savez sûrement, votre gouvernement admet que ce compte ne sera pas en place avant un an. En quoi cela aide-t-il ceux qui rêvent de devenir propriétaires de leur propre maison, en particulier les acheteurs d’une première habitation en Colombie-Britannique?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question. La mise en œuvre de certaines mesures, par exemple les changements au régime fiscal, ne se fait pas du jour au lendemain, comme pourront le comprendre les sénateurs et les Canadiens avertis. Cela ne signifie pas pour autant que le gouvernement n’essaie pas de mettre en place des solutions pour relever les défis et offrir cette aide plus rapidement.

Plusieurs de ces solutions sont énoncées dans le budget de 2022 et visent à doubler le nombre de logements construits au Canada au cours des 10 prochaines années, à accroître rapidement l’offre de logements abordables et à faire en sorte que les maisons soient habitées par les familles qui en sont propriétaires. Voilà pourquoi le gouvernement investira 4 milliards de dollars dans le nouveau Fonds pour accélérer la construction de logements. Cet argent aidera les municipalités à accélérer la mise en œuvre des projets de construction afin de créer 100 000 nouveaux logements. C’est aussi la raison pour laquelle le gouvernement investira 1,5 milliard de dollars afin d’élargir l’Initiative pour la création rapide de logements et ainsi créer 6 000 logements très abordables supplémentaires. Par ailleurs, dans le cadre du Fonds national de co-investissement pour le logement, le gouvernement investira 2,9 milliards de dollars pour construire et rénover jusqu’à 22 000 logements. Il a également réservé une enveloppe de 500 millions de dollars pour créer un nouveau programme de développement de coopératives d’habitation dans le but d’augmenter le nombre de logements coopératifs.

Les anciens combattants

Le règlement des réclamations

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, ma prochaine question, qui s’adresse encore une fois au leader du gouvernement, fait suite à une question que j’ai posée l’an dernier au sujet de Sean Bruyea, un ancien combattant qui a fait l’objet d’attaques personnelles dans un article signé par le ministre Seamus O’Regan et publié dans le Hill Times. Voici la question que j’ai posée l’an dernier, monsieur le leader. J’ose espérer que vous avez maintenant une réponse à me donner.

En janvier 2020, le Bureau de l’ombudsman des vétérans a recommandé de faire appel à un médiateur pour améliorer les rapports et la communication entre Anciens Combattants Canada et le vétéran en question. Il y a 17 mois, le ministre MacAulay a réagi positivement à cette recommandation. Cependant, j’ai récemment appris que des fonctionnaires du ministère refusent toujours de l’appliquer.

Monsieur le leader, en juin dernier, je vous ai posé une question sur ce cas mais je n’ai reçu aucune réponse, ni par écrit ni autrement. Le gouvernement peut-il confirmer qu’aucune procédure de médiation n’a encore été mise en place? J’espère que vous pourrez répondre par oui ou non. Le cas échéant, quelle pourrait être la raison de ce retard?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Je n’avais effectivement pas la réponse quand vous me l’avez posée la première fois et je suis navré d’apprendre que vous n’avez pas reçu de réponse écrite depuis. Honorable collègue, si je l’avais su, je me serais renseigné afin de vous fournir une réponse rapidement. Malheureusement, comme je viens seulement maintenant d’être mis au courant de la situation, je devrai me renseigner car je n’ai pas d’information à vous donner pour l’instant.

Le sénateur Plett : Je vous ai posé cette question en juin dernier. Je peux vous dire qu’à notre retour de la pause, je vous la poserai à nouveau. J’espère que je recevrai alors une réponse directe. Je vous donne un préavis.

Monsieur le leader, le ministère des Anciens Combattants a annulé le remboursement des frais de garde d’enfants pour le jeune fils de M. Bruyea après la publication dans le journal The Hill Times de ses critiques à l’égard du ministre O’Regan. Dans un rapport publié il y a deux ans, l’ombudsman des vétérans s’est dit préoccupé par le fait que le ministère n’avait pas été juste envers ce vétéran. Le rapport expliquait en détail que M. Bruyea ne semblait pas faire confiance au ministère des Anciens Combattants et qu’il considérait cette mesure à son égard comme une mesure de rétorsion.

Votre gouvernement a accepté une médiation. On me dit qu’elle n’a toujours pas eu lieu bien plus d’un an après les faits. Comment un délai aussi long peut-il renforcer la confiance entre un vétéran et le ministère? Comment cette promesse de médiation peut-elle être considérée comme sincère, sénateur Gold?

Le sénateur Gold : Je vous remercie d’avoir soulevé cette question. Encore une fois, je regrette de ne pas avoir été mis au courant que vous n’aviez pas reçu de réponse. Je vais certainement ajouter vos préoccupations aux demandes de renseignements que je ferai maintenant que j’en suis informé.


[Français]

ORDRE DU JOUR

Les travaux du Sénat

L’honorable Raymonde Gagné (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’article 4-13(3) du Règlement, j’informe le Sénat que, lorsque nous passerons aux affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux dans l’ordre suivant : l’étude de la motion no 42, suivie de l’étude de la motion no 41, suivie de tous les autres articles dans l’ordre où ils figurent au Feuilleton.

(1450)

[Traduction]

Projet de loi sur la diffusion continue en ligne

Projet de loi modificatif—Motion tendant à autoriser le Comité des transports et des communications à étudier la teneur du projet de loi—Débat

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 17 mai 2022, propose :

Que, conformément à l’article 10-11(1) du Règlement, le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à examiner la teneur du projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois, déposé à la Chambre des communes le 2 février 2022, avant que ce projet de loi ne soit présenté au Sénat;

Que, aux fins de cette étude, le comité soit autorisé à se réunir, même si le Sénat siège à ce moment-là ou est alors ajourné, l’application des articles 12-18(1) et 12-18(2) du Règlement étant suspendue à cet égard.

 — Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui au sujet de la motion no 42 du gouvernement, qui autorise le Comité sénatorial permanent des transports et des communications à examiner la teneur du projet de loi C-11, connu sous le nom de Loi sur la diffusion continue en ligne.

Comme les honorables sénateurs le savent, le projet de loi C-11 est essentiellement la version révisée du projet de loi C-10 de la 43e  législature, qui est mort à l’étape de l’étude en comité au Sénat au moment de la dissolution du Parlement.

Vous vous souviendrez que le projet de loi C-10 a fait l’objet d’un débat approfondi et passionné en deuxième lecture dans cette enceinte il y a moins d’un an. À cette occasion, nous avons entendu le parrain, le sénateur Dawson; le porte-parole, le sénateur Housakos; et les responsables législatives du Groupe des sénateurs indépendants, les sénatrices Dasko et Simons. Comme ces quatre personnes jouent toujours les mêmes rôles à l’égard du projet de loi C-11, je prévois que la situation se répétera lorsque le projet de loi C-11 nous sera renvoyé. Nous avons également entendu les discours des sénateurs Richards, Bovey, Loffreda, Wallin, Downe, Colin Deacon et Miville-Dechêne. Ils ont exprimé des points de vue différents, mais tous ont soulevé des questions précises sur lesquelles le comité devrait se concentrer et tous ont convenu de l’importance de l’étude en comité.

Aujourd’hui, je propose que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à commencer ce travail. Pour vous rafraîchir la mémoire, et pour le bien de nos nouveaux collègues au Sénat, l’article 10-11(1) du Règlement permet de renvoyer le contenu d’un projet de loi à un comité pour qu’il puisse l’étudier et l’analyser avant que le projet de loi soit adopté à l’autre endroit. Essentiellement, cette procédure permet qu’un examen complémentaire du projet de loi soit fait en parallèle avec son cheminement dans le processus parlementaire.

[Français]

Le projet de loi C-11 devra encore passer par chacune des étapes législatives lorsqu’il arrivera dans cette Chambre de l’autre endroit. Entretemps, les membres du Comité sénatorial permanent des transports et des communications auront l’occasion de mieux comprendre son contenu, d’entendre les témoignages des fonctionnaires du ministère et des témoins, pour et contre, et de commencer à approfondir les questions soulevées dans le cadre des débats tenus sur le projet de loi C-10 au cours de la dernière législature.

Vous remarquerez que la motion ne contient aucune contrainte liée aux délais pour le comité, et c’est délibéré. L’objectif est simplement de soutenir le comité afin qu’il dispose des outils et de la souplesse nécessaires lui permettant d’organiser et de mener ses travaux comme il l’entend, de sorte qu’il puisse adapter la trajectoire de son analyse à l’environnement imprévisible de la Chambre des communes.

[Traduction]

Honorables sénateurs, j’ai clairement compris que vous voulez autant de temps que possible pour vous concentrer sur l’étude des mesures législatives du gouvernement. Vous insistez pour avoir suffisamment de temps pour bien étudier et débattre les projets de loi, peu importe qu’ils arrivent rapidement ou tardivement. C’est dans cet esprit que je propose cette motion. Comme nous sommes maîtres de nos travaux, je crois que nous pouvons et nous devrions utiliser tous les outils à notre portée pour réaliser l’examen essentiel des mesures législatives du gouvernement, qui est au cœur de notre fonction et de notre mandat constitutionnel. Avec le consentement du Sénat, l’examen préalable de projets de loi est en notre pouvoir, et cela nous laisse le temps d’étudier minutieusement les mesures législatives sans les contraintes de temps qui pourraient survenir une fois que l’autre endroit les a adoptées.

[Français]

Ainsi, la motion du gouvernement no 42 propose d’examiner à l’avance le projet de loi C-11 et, à mon avis, elle répond aux critères et à la nécessité d’une étude préalable au Sénat. Cela permettrait au comité de faire un travail approfondi et lui donnerait le pouvoir d’entreprendre l’étude d’un projet de loi qui figure en tête de liste de ce programme parlementaire, tout en ayant un certain degré de souplesse quant à la façon dont le travail sera accompli.

Chers collègues, il est important de noter que lorsque le projet de loi C-11 arrivera au Sénat de l’autre endroit, il devra franchir chacune des étapes législatives de la manière et à la vitesse dont l’aura décidé cette Chambre.

[Traduction]

Cette motion ne porte aucunement préjudice à la manière dont le Sénat peut choisir de traiter le projet de loi C-11. Soyons clairs, c’est le Sénat qui a le dernier mot sur le nombre de jours et de semaines qu’il choisit de consacrer à la deuxième lecture, à l’étude en comité et à la troisième lecture d’un projet de loi d’initiative ministérielle.

Chers collègues, il est parfaitement légitime, sain et naturel que le gouvernement actuel ou tout autre gouvernement ait des objectifs ambitieux. Après tout, les partis politiques qui forment les gouvernements ont des programmes électoraux et ont fait des promesses aux électeurs. Cependant, que cela me plaise ou non, il m’incombe, en tant que représentant du gouvernement au Sénat, de persuader le Sénat d’accepter le rythme des travaux. Cette motion ne fait que lancer une étude que de nombreux sénateurs souhaitent vivement entreprendre afin que notre institution, le Sénat, puisse apporter une valeur ajoutée à cette importante initiative stratégique et procéder à un examen objectif.

Chers collègues, à toutes fins utiles, le projet de loi C-11 est à l’étude au Parlement depuis 2020. Son prédécesseur, le projet de loi C-10, a fait l’objet d’une étude sérieuse à l’autre endroit. Il a été renvoyé au comité sénatorial le 29 juin 2021. Je propose simplement de permettre au comité de reprendre là où il en était et d’entreprendre une étude préalable.

De nombreuses préoccupations ont été soulevées lorsque nous avons amorcé notre étude de l’ancien projet de loi C-10 à l’étape de la deuxième lecture. Le comité pourra s’inspirer de ces préoccupations pour organiser ses travaux et déterminer si la nouvelle version du projet de loi, le projet de loi C-11, remédie aux préoccupations ou problèmes initialement soulevés, comme le prétend le gouvernement.

Tous conviendront que ce projet de loi doit être étudié à fond. Nous savons tous qu’il est hautement politisé. Voilà pourquoi je crois que le Sénat jouera un rôle essentiel dans l’étude du projet de loi C-11, car celui-ci doit être étudié dans une optique moins partisane et plus indépendante, et je crois que cela doit se faire dès maintenant. En même temps, il est important de comprendre que, si l’adoption du projet de loi C-11 était retardée, des centaines de millions de dollars devant être affectés au contenu canadien et aux créateurs de contenu canadien seraient perdus. Un retard prolongerait le vide juridique de la Loi sur la radiodiffusion en ce qui concerne les communautés minoritaires et marginalisées.

[Français]

Chers collègues, les études préalables au Sénat ne sont pas nouvelles ni rares. Elles ne se limitent pas non plus aux projets de loi de nature financière. En 2001, dans le cadre d’une décision, le Président du Sénat a décrit ainsi l’objectif d’une étude préalable dans la pratique du Sénat :

[Traduction]

L’étude préalable fait partie des usages du Sénat depuis plus de trente ans [...] Cette façon de procéder vise à laisser plus de temps au Sénat pour étudier les projets de loi, en particulier lorsque ceux-ci sont complexes et controversés, sans perturber le calendrier législatif global du gouvernement. Elle permet en même temps aux sénateurs d’intervenir plus activement dans le processus législatif puisqu’elle fait en sorte que le travail du Sénat ait une certaine influence sur l’étude d’un projet de loi, lorsque celui-ci est encore à l’étude à l’autre endroit.

Honorables sénateurs, puisque les comités sénatoriaux font un si bon travail, les études préalables comportent des avantages considérables.

[Français]

En entreprenant une étude préalable, le comité a la possibilité d’être sensibilisé à certaines questions, de faire entendre en temps opportun les préoccupations des parties prenantes, de susciter des observations officielles et de suggérer des changements que l’autre endroit pourrait intégrer au projet de loi avant son adoption.

(1500)

[Traduction]

De plus, le fait de définir les questions essentielles sur lesquelles le Sénat pourrait vouloir se pencher une fois qu’il aura reçu le projet de loi présente un avantage considérable.

Bien qu’on n’en parle pas très souvent, d’après mon expérience, les études préalables peuvent s’avérer essentielles à la préparation du Sénat en vue de l’étude de mesures législatives complexes.

Chers collègues, avec tout le respect que je vous dois, je suis fondamentalement en désaccord avec l’argument selon lequel les études préalables minent en quelque sorte le rôle fondamental du Sénat, qui est de procéder à un second examen objectif. Ce n’est tout simplement pas ce que j’ai pu observer. Au contraire, j’ai pu constater les avantages concrets des études préalables dans le sens où elles permettent de mettre à l’avant-plan des enjeux délaissés par la Chambre et à effectuer de véritables changements, que ce soit à la Chambre ou au Sénat.

Au bureau du représentant du gouvernement au Sénat, nous savons à quel point ces études sont importantes, car nous travaillons régulièrement à résoudre des problèmes qui découlent des études préalables du Sénat dans le cadre des procédures de la Chambre ou par le biais d’une intervention ciblée du gouvernement et de parties prenantes. Même lorsque cela n’est pas possible, chers collègues, les études préalables que nous effectuons permettent de bien préparer le Sénat à se pencher sur les questions essentielles, ce qui débouche souvent sur des améliorations mûrement réfléchies et acceptées par l’autre endroit.

[Français]

Vous vous souviendrez, chers collègues, que, quand nous avons débattu le projet de loi sur l’aide médicale à mourir, la question de l’exclusion de la santé mentale s’est cristallisée comme une préoccupation majeure durant l’étude préalable. Lorsque nous avons reçu le projet de loi, nous savions qu’il s’agissait d’une question essentielle, et nous avons eu la possibilité d’approfondir le débat et de faire une étude exhaustive pour ultimement proposer des amendements qui ont été acceptés par l’autre endroit. Nous étions prêts à recevoir le projet de loi, et notre travail a fait la différence.

[Traduction]

Je tiens aussi à souligner que les études préalables sont loin d’être un phénomène nouveau, même pour les questions non budgétaires. Un examen rapide de ce qui s’est passé durant les dernières législatures permet de constater que le Sénat a effectué 16 études préalables pendant la 41e législature seulement, sous le gouvernement précédent. Ces études ne portaient pas uniquement sur des projets de loi d’exécution du budget ou des projets de loi de crédits, mais sur des sujets aussi variés que la citoyenneté, les élections nationales, les droits des Premières Nations, des changements au Code criminel, la modernisation du Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, ou encore des accords de libre-échange. Il y a presque 50 ans, en 1974, pendant la 30e législature, le Sénat a réalisé des études préalables pour 22 projets de loi portant sur des sujets comme des modifications constitutionnelles, la prévention des crimes violents, des autorisations pour la construction de pipelines, des changements à l’assurance-chômage et les règles applicables à la tenue d’un référendum national.

Chers collègues, je me dois de souligner que la 41e législature et la 30e législature correspondent à des gouvernements majoritaires, dirigés respectivement par le premier ministre Harper et le premier ministre Pierre Trudeau. En outre, les partis au pouvoir disposaient aussi de la majorité des sièges au Sénat pendant ces années. Les deux Chambres contrôlaient les travaux, y compris le programme et le rythme du processus législatif. Pourtant, le Sénat a été autorisé à effectuer des études préalables, ce qu’il a fait à maintes reprises avant que les projets de loi proposés à l’autre endroit n’arrivent au Sénat.

Comme le savent très bien les sénateurs, dans une situation de gouvernement minoritaire, le moment choisi pour la présentation et l’adoption d’une mesure législative n’est pas sous le contrôle immédiat du gouvernement. Comme nous le savons, cela vient compliquer le travail en aval que le Sénat doit accomplir. Chers collègues, nous n’avons aucun contrôle sur les travaux de l’autre endroit. Cependant, nous avons le contrôle sur le déroulement des travaux au Sénat.

Au cours du débat sur cette motion, nous entendrons peut-être dire qu’une étude préalable risque d’être inutile parce qu’il est possible que le projet de loi C-11 soit modifié à la Chambre et que, lorsqu’il sera renvoyé au Sénat, certaines provisions peuvent être différentes de celles que nous aurions examinées au cours de l’étude préalable. Encore une fois, avec tout le respect que je vous dois, chers collègues, ce n’est pas un argument convaincant ou persuasif.

Évidemment, il est possible que le projet de loi C-11 soit amendé, mais je ne sais pas si ce sera le cas et personne ici ne le sait. C’est une possibilité chaque fois que la tenue d’une étude préalable est approuvée au Sénat, mais ce n’est pas assuré. Si la seule possibilité que la Chambre amende un projet de loi justifiait que le Sénat s’abstienne de mener une étude préalable, il n’y aurait jamais d’étude préalable des projets de loi. Au contraire, il arrive fréquemment que des amendements apportés par la Chambre pendant ou après une étude préalable répondent aux préoccupations et aux enjeux soulevés par les partis de l’opposition à la Chambre et au Sénat. Ce fut le cas pour le projet de loi C-12 sur la carboneutralité et, plus récemment, pour le projet de loi C-3 sur les congés de maladie payés. C’est l’un des objectifs d’une étude préalable. Qui sait? Peut-être que c’est également ce qui arrivera pour le projet de loi C-11 et nous devrions nous en réjouir si tel est le cas.

Lorsqu’un projet de loi nous est renvoyé et qu’une étude préalable a été menée, nous pouvons vérifier si les préoccupations soulevées par le Sénat ont été prises en compte suffisamment ou pas du tout. Si des amendements ont été apportés à la Chambre, le Sénat est tout à fait en droit de les étudier et il peut le faire de façon très ciblée, parce qu’il a pu étudier la version précédente du projet de loi et tirer des conclusions lors de l’étude préalable.

J’ai également entendu dire dans les coulisses qu’une étude préalable ne serait pas utile parce qu’il est possible que le Sénat ne reçoive pas le projet de loi à temps. Je répète, avec tout le respect que je vous dois, que ce n’est pas un argument probant, c’est purement hypothétique.

En ma qualité de représentant du gouvernement, je vous dis que je ne sais pas quand ce projet de loi nous sera renvoyé. Il s’agit néanmoins d’une priorité absolue pour le gouvernement qui fait tout en son pouvoir pour qu’il franchisse la ligne d’arrivée. En outre, comme nous ne savons pas quand il sera renvoyé au Sénat — nous ignorons quand nous en serons saisis —, il serait utile de faire une étude préalable dans un cadre souple, sans contraintes. Même si le projet de loi C-11 n’est pas renvoyé au Sénat avant l’automne, je ne vois pas en quoi une étude préalable serait une perte de temps. Voici le point essentiel : je propose que nous entamions le travail que nous faisons le mieux pour être préparés lorsque nous recevrons le projet de loi C-11.

À mon avis — et je sais que c’est un point de vue que partagent bon nombre de sénateurs ainsi que des observateurs qui s’intéressent au travail que fait le Sénat depuis plusieurs législatures —, le Sénat excelle dans les études en comité. Je suis persuadé que tout travail préalable que nous ferons sur le projet de loi C-11 portera fruit, peu importe quand cette mesure nous sera renvoyée.

Chers collègues, il est judicieux et sage d’utiliser les outils dont nous disposons pour composer avec les difficultés qui se présentent à nous quant à la capacité des comités de siéger et avec l’impossibilité de prévoir quand la Chambre adoptera certaines mesures législatives prioritaires. Évidemment, nous pourrions nous contenter d’attendre sans rien faire, mais je préfère proposer la motion no 42 du gouvernement comme outil pour relever ces défis.

[Français]

Je crois que nous devrions tirer parti du temps dont nous disposons maintenant, mais dont nous ne disposerons peut-être pas plus tard, en raison de contraintes considérables qui pèsent sur les comités. En fait, les ajustements que nous avons apportés tout récemment dans le cadre d’un modèle de Sénat hybride visaient à assurer que les comités disposent d’un maximum de souplesse pour faire leur travail sur les affaires du gouvernement de manière appropriée et approfondie.

[Traduction]

La présente motion permettra au comité d’avoir le temps de décider de ses travaux et de se prévaloir des créneaux supplémentaires disponibles, au besoin.

Chers collègues, nous savons tous que, à cause des contraintes mentionnées ad nauseam dans cette enceinte, il sera difficile de demander aux comités de faire un travail intensif à la fin de nos séances. En outre, en raison de l’imprévisibilité des travaux de la Chambre, il se pourrait que des projets de loi soient renvoyés ici plus tôt que prévu. C’est impossible de le savoir. Si c’est ce qui produit avec le projet de loi C-11, une étude préalable pourrait se transformer en étude officielle une fois que l’étape de la deuxième lecture serait terminée et que le projet de loi aurait été renvoyé au comité.

Il est aussi concevable que même si un projet de loi nous parvenait tardivement, les problèmes de capacité empêcheraient le comité de réaliser une étude préalable. Dans un tel scénario, le travail préalable effectué sera crucial pour l’examen. Nous ne pouvons tout simplement pas laisser les limites de capacité auxquelles nous nous heurtons nous empêcher d’accomplir le travail que les Canadiens attendent de nous.

Comme l’a dit la sénatrice Saint-Germain quand elle a parlé de la motion no 30 le 29 mars :

Conformément à l’article 10-11(1) du Règlement, nous pouvons faire des études préalables des projets de loi qui, nous savons, nous serons envoyés en retard aux fins d’étude. Cette pratique est avantageuse, car elle nous permet d’être prêts à débattre des projets de loi et à finalement proposer des amendements lorsque les projets de loi nous sont présentés dans des circonstances qui exigent une réponse diligente et opportune.

(1510)

Chers collègues, n’est-ce pas là exactement notre travail? N’est-ce pas ce pour quoi nous avons été nommés ici : être informés pour être prêts à débattre et à étudier les mesures législatives et, si nécessaire, à les améliorer au moyen d’amendements?

Je comprends votre frustration par rapport à mon incapacité à vous fournir un calendrier précis pour l’adoption de ces projets de loi prioritaires. J’aimerais vraiment pouvoir vous donner un portrait plus clair. Cependant, nous devons tout de même nous acquitter de notre travail; nous devons y parvenir. Il nous incombe d’utiliser tous les outils à notre disposition pour que ces projets de loi ne soient pas étudiés à la hâte.

Permettez-moi de citer le sénateur Tannas, qui a dit ce qui suit le 8 février dernier :

Je pense que plus nous aurons accès à des outils dans le Règlement, comme l’étude préalable — pour laquelle un processus d’approbation existe —, mieux ce sera.

Je suis d’accord avec le sénateur Tannas sur ce point. Les honorables sénateurs demandent et, dans certains cas, exigent d’avoir plus de temps pour l’étude des projets de loi.

Sur le même sujet, j’aimerais citer mon bon ami le sénateur Plett, qui a dit ce qui suit le 16 novembre 2011 :

[...] je vous propose d’effectuer une étude préliminaire, de manière à ce que nous ayons suffisamment de temps pour débattre de ce projet de loi.

Il a proposé une motion concernant une étude préliminaire sur le projet de loi C-18 d’alors, Loi sur le libre choix des producteurs de grains en matière de commercialisation. Le sénateur Plett a ensuite ajouté ceci :

Le Sénat doit entreprendre une étude préalable pour que le projet de loi soit examiné à fond. Nous prévoyons que ce projet de loi nous sera soumis bientôt, et une étude préalable nous donnerait plus de temps pour bien l’étudier, comme le sénateur Peterson nous l’a demandé, au lieu de procéder à une étude expéditive au sein du comité.

En fin de compte, chers collègues, cette motion n’était pas nécessaire, puisque je crois savoir que la clôture a été imposée à l’autre endroit et que le projet de loi a pu être envoyé à temps au Sénat. Quoi qu’il en soit, la logique exposée par le sénateur Plett est manifestement pertinente à la question dont nous sommes saisis aujourd’hui.

La motion no 42 repose principalement sur la même logique que le sénateur Plett a exposée à l’égard du projet de loi C-18. Elle concerne le temps dont nous disposons pour mener nos travaux. Dans le même discours du 16 novembre 2011, le sénateur Plett a dit :

Si nous devons adopter cet important projet de loi, il est essentiel qu’il reçoive la sanction royale avant les vacances de Noël pour donner aux agriculteurs de l’Ouest canadien le temps de trouver les marchés où ils vendront leurs prochaines récoltes de blé et d’orge.

Chers collègues, adopter le projet de loi C-11 rapidement revêt la même importance.

[Français]

Comme je l’ai mentionné plus tôt, le retard dans l’adoption de ce projet de loi fera perdre aux parties prenantes, qui sont les artistes et les créateurs canadiens, des centaines de millions de dollars. De plus, tout retard prolongerait le vide actuel en matière de contenu canadien pour les communautés marginalisées et minoritaires et leurs artistes.

[Traduction]

Certaines personnes dans cette Chambre pourraient vouloir faire du débat sur cette motion un débat sur les sénateurs et sur le rôle du Sénat. En tout respect, honorables sénateurs, cette motion n’a rien à voir avec nous. Elle porte sur les créateurs de contenu canadiens qui travaillent sans relâche et qui attendent depuis des années, voire des décennies, que l’on modernise l’environnement juridique dans lequel ils évoluent, et c’est la responsabilité des parlementaires.

Quant à ceux qui diront qu’il n’est pas urgent d’adopter le projet de loi C-11 et que le temps ne presse pas, encore une fois, je suis respectueusement en désaccord avec eux. Selon moi, étant donné que des artistes canadiens sont privés d’une source de revenus qu’ils méritent, et qu’on accepte de façon tacite que du contenu canadien ne soit pas accessible, je considère que ce dossier est urgent et que le temps presse. C’est aussi une priorité pour le gouvernement.

En ce qui concerne les sénateurs qui, depuis deux ans, font part de leurs réserves à l’égard de ce projet de loi sur Twitter, j’espère qu’ils appuieront cette motion, car elle leur donnera l’occasion de vérifier le bien-fondé de leurs affirmations.

Certains d’entre vous ne sont peut-être pas favorables au projet de loi C-11, mais ce n’est pas une raison pour refuser que les créateurs de contenu bénéficient du travail que vous pouvez faire avec la diligence nécessaire. Il n’y a aucune raison d’obliger les créateurs de contenu à attendre encore plus longtemps avant que le Sénat commence son travail.

Que nous soyons favorables ou non au projet de loi C-11, en tant que parlementaires, nous devrions démontrer que nous nous soucions de cette industrie et que nous sommes prêts à nous pencher sur cette question dès maintenant.

[Français]

Je demande aux honorables sénateurs d’approuver cette motion et d’autoriser l’étude préalable du projet de loi C-11. Ce projet de loi ne devrait pas faire l’objet d’un examen hâtif en raison de contraintes de temps dont nous ne sommes ni responsables ni maîtres. Nous avons le pouvoir et les outils nécessaires pour commencer notre travail dès que possible, et il nous incombe de les utiliser.

[Traduction]

Je cite encore une fois l’actuel leader de l’opposition :

Pour le moment, j’aimerais simplement inviter tous les sénateurs à appuyer avec moi la motion en faveur de son étude préliminaire. Aujourd’hui, honorables sénateurs, nous ne vous demandons pas d’appuyer le projet de loi, mais bien d’appuyer une étude.

Je n’aurais pas pu mieux le dire moi-même. Merci.

Des voix : Bravo!

Son Honneur le Président : Sénateur Gold, plusieurs sénateurs souhaitent poser des questions, ici, dans l’enceinte et à distance. Êtes-vous prêt à répondre à des questions?

Le sénateur Gold : Bien sûr.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Je n’aurais pas pu mieux le dire moi-même. Oh, mais c’est moi qui l’ai dit.

Hier, dans mon bureau, lorsque mon équipe et moi avons tenu une séance de débreffage en après-midi, nous avons abordé le sujet des débats avec soi-même. J’ai dit : « J’aime argumenter avec moi‑même. J’en sors toujours victorieux. » Selon moi, c’est ce qui s’est produit ici aujourd’hui : vous argumentez avec vous-même, parce que vous semblez connaître exactement toutes les raisons pour lesquelles nous vous aurions dit que nous ne sommes pas d’accord. Donc merci, au moins, d’avoir préparé nos notes d’allocution. Nous vous en sommes reconnaissants.

Puisque vous avez cité quelques interventions, je me permets de citer moi-même, honorable collègue, un membre de cette assemblée avant de vous poser quelques questions. Voici la citation :

[...] cette Chambre mène à l’occasion des études préalables lorsque les circonstances s’y prêtent. Évidemment, le Sénat l’a fait plus régulièrement à l’égard des questions budgétaires.

Cela a été dit par nul autre que l’ancien leader du gouvernement au Sénat, le sénateur Peter Harder, le 30 mai 2018. Je n’aurais pas pu mieux le dire moi-même.

Sénateur Gold, vous aviez quelques chiffres sur les gouvernements précédents. Permettez-moi de vous demander si vous connaissez le nombre exact d’études préalables non financières que le gouvernement Harper a effectuées pendant les neuf ans et demi où il était au pouvoir — dont la moitié, soit dit en passant, dans le cadre d’un gouvernement minoritaire, et non majoritaire comme vous y avez fait allusion — et que le gouvernement Trudeau a effectuées pendant ses quatre ans et demi de gouvernement majoritaire, à l’exception des six derniers mois. Oublions ce que Trudeau père a fait et concentrons-nous sur ces deux gouvernements. Avez-vous les chiffres sur les études préalables non financières?

Le sénateur Gold : Non, je n’ai pas de chiffres précis, mais je vous remercie d’avoir soulevé cette question. Il est vrai que, bien que nous ayons tendance à associer les études préalables à des projets de loi budgétaires et à des projets de loi de crédits, comme je l’ai dit dans mon intervention, et comme je suis sûr que vous nous le ferez savoir lorsque vous vous adresserez à nous pendant le débat, je sais qu’un nombre important d’études préalables ont été effectuées pour des projets de loi non budgétaires. Comme j’ai tenté de le souligner dans mon intervention, et je ne me répéterai pas, elles ont été salutaires pour la loi et les Canadiens et ont fait honneur au Sénat pour ce qui est de sa contribution au débat sur les politiques.

Le sénateur Plett : Merci, encore une fois, comme c’est l’habitude pendant la période des questions, pour cette non-réponse.

Toutefois, je ne vais pas attendre le débat pour vous le dire. Je vais vous le dire maintenant.

(1520)

Il y a eu 10 études préalables de projets de loi ne portant pas sur l’exécution du budget sous le gouvernement de Stephen Harper entre 2006 et 2015, gouvernement qui a été minoritaire la moitié de ce temps. En quatre ans et demi de gouvernement Trudeau, il y en a eu 14, plus 7 autres sur des projets de loi d’exécution du budget. Je dirais qu’il s’agit là d’une tendance, en particulier pour quelqu’un qui a un gouvernement majoritaire.

Je vais évidemment en parler. Le problème, sénateur Gold, c’est une absence totale de gestion de la part d’un gouvernement incompétent. Pour paraphraser le sénateur Tannas, il ne nous revient pas d’agir dans l’urgence parce que vous êtes incapable de gérer votre temps. C’est à peu près ce qu’il a dit, et je suis d’accord.

Ce gouvernement est incapable de présenter son projet de loi. Vous avez dit vous-même que le projet de loi C-10 avait été présenté à l’autre endroit à la législature précédente. Le gouvernement a eu quatre ans pour agir. Il n’a rien fait. Voilà maintenant qu’il attend encore. Il est incapable de nous donner une date limite. Vous êtes incapable de nous donner un échéancier, mais pourquoi ne pas procéder à une étude préalable, au cas où on nous le renverrait à un moment donné?

Si c’est tellement urgent, pourquoi le gouvernement ne l’a-t-il pas fait savoir, et pourquoi nous traite-t-il une fois de plus comme une Chambre de second ordre en exigeant que nous fassions quelque chose alors qu’il est incapable de contrôler son propre programme?

Le sénateur Gold : Eh bien, je vous remercie de confirmer ma présomption que certaines personnes voudraient que ce débat porte sur le Sénat ou le gouvernement.

Ma position et la position du gouvernement, la position du Sénat, qui a approuvé chacune des études préalables... Ce n’est pas le premier ministre qui a approuvé les études préalables au Sénat, comme vous l’avez laissé croire. C’est le Sénat qui a accepté de mener les études préalables, parce que les sénateurs ont estimé collectivement que c’était la bonne chose à faire.

À titre de représentant du gouvernement, j’estime que les études préalables sont un outil utile pour le Sénat, qui peut ainsi s’acquitter de sa responsabilité constitutionnelle. C’est pour cette raison que j’ai présenté cette suggestion. Elle a pour but de nous donner la possibilité de faire notre travail, de mener nos travaux sans être assujettis aux contraintes de temps. De plus, elle se voulait une réponse aux demandes et inquiétudes légitimes que nombre d’entre vous ont formulées dans cette enceinte afin de ne pas subir des pressions pour terminer les travaux.

Je ne m’excuserai pas d’avoir suggéré l’idée que de mener une étude préalable sur ce projet de loi était une bonne chose. Au contraire, c’est une très bonne chose. C’est une bonne chose, parce que cela nous permet d’exécuter notre travail comme nous avons été appelés à le faire.

Son Honneur le Président : Sénateur Plett, selon le processus que nous avons suivi jusqu’ici, les sénateurs peuvent poser une question et une question complémentaire. Si le temps le permet, nous ferons un deuxième tour. Vous êtes inscrit sur la liste pour le deuxième tour.

L’honorable Scott Tannas : Sénateur Gold, je vous remercie de votre discours. Comme le sénateur Plett l’a mentionné, il s’agit d’une situation relativement rare. Notre bureau de recherche a calculé, je crois, qu’une vingtaine d’études préalables ont été consacrées à des sujets non financiers au cours des 32 dernières années, une période pendant laquelle se sont succédé des gouvernements de tous les horizons politiques, majoritaires ou minoritaires.

Je crois, en effet, que cette option peut être appropriée dans certains cas, et que la situation dont nous discutons pourrait être l’un de ces cas.

À ma connaissance, aucune réunion de comité n’a encore été consacrée à ce projet de loi à la Chambre des communes. J’ai l’impression qu’agir avant même la Chambre des communes et son comité pourrait donner l’impression d’un empressement presque exagéré, d’une sorte de flatterie. Est-il vrai, comme je le crois, que le comité n’a pas encore tenu de réunion ni entendu de témoins à propos du projet de loi C-11? Si c’est le cas, ne croyez-vous qu’il serait peut-être bon d’attendre jusqu’à ce que leur comité ait au moins commencé son étude et entendu quelques témoins, pour avoir une idée de l’orientation des travaux?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question. J’exprime respectueusement mon désaccord. Vous avez raison. Il est difficile de faire avancer les dossiers dans la législature actuelle. Le gouvernement est toujours minoritaire, malgré... J’aimerais poursuivre.

Le sénateur Plett : Désinformation.

Le sénateur Gold : Je vais faire comme si je n’avais rien entendu. Nous sommes encore en situation de gouvernement minoritaire et, bien qu’il y ait une entente de soutien sans participation, cela ne signifie pas que le gouvernement est libre d’aller de l’avant à sa guise. Aucun parti d’opposition, pas même le NPD, n’a accordé de chèque en blanc au gouvernement.

Cependant, je m’égare, et les parlementaires aguerris savent de quoi je parle.

Pour répondre à votre question, sénateur Tannas, vous avez peut-être raison. Je pense que le projet de loi a été renvoyé au comité en raison de certaines ententes qui ont été conclues.

Toutefois, le problème demeure le même : le projet de loi C-11 est en grande partie tributaire des modifications apportées au projet de loi C-10, dont est saisi le Parlement depuis déjà un certain temps. Il ne s’agit pas d’un nouveau projet de loi. Il ne s’agit pas non plus d’un nouvel enjeu. Les mêmes forces qui se mobilisent pour et contre le projet de loi C-10 sont en train de préparer leurs arguments en ce moment même.

Nous connaissons les enjeux, et il nous incombe maintenant d’étudier la question de manière approfondie pour déterminer dans quelle mesure le projet de loi C-11 répond à certaines des préoccupations soulevées. Ainsi, nous aurons les informations nécessaires pour non seulement faire part de notre point de vue à l’autre endroit pendant que le projet de loi est encore à l’étude au comité ou qu’il fait encore l’objet d’un débat, mais aussi pour être prêts à l’étudier et à en débattre de manière ciblée, sensée et rigoureuse lorsque nous en serons saisis.

Non, je pense qu’il serait malavisé d’attendre. C’est maintenant qu’il faut le faire.

Le sénateur Tannas : J’ai quelques questions rapides. Convoquerions-nous les mêmes témoins pendant que se déroule l’audience? Pourrions-nous demander que le comité trouve d’autres témoins pour que nous puissions avoir un point de vue différent? Nous pouvons tous nous rendre à la Chambre des communes et regarder les séances du comité ou les écouter à la télévision si nous voulons être au courant de ce qui se passe. C’est peut-être une pratique à adopter si nous voulons faire avancer les choses.

L’autre question est la suivante : depuis quand le Sénat du Canada doit-il s’en faire parce que le gouvernement est minoritaire à la Chambre des communes?

Une voix : Bravo!

Le sénateur Tannas : Notre travail consiste à étudier les questions dont nous sommes saisis lorsque nous en sommes saisis. Pourriez-vous nous dire pourquoi le Sénat devrait s’en faire parce que le gouvernement est minoritaire? Merci.

Le sénateur Gold : Je vais répondre à vos questions une à la fois.

Les comités du Sénat sont maîtres de leur procédure. Si cette motion est adoptée, le comité décidera des témoins qu’il veut recevoir et du moment où il les recevra. Il voudra assurément recevoir des ministres et des fonctionnaires et il est possible qu’il souhaite recevoir des témoins qui sont entendus à l’autre endroit. Il pourrait aussi choisir de convoquer d’autres témoins, car les comités du Sénat sont libres de procéder comme ils l’entendent.

Ce que nous faisons de mieux — j’espère vraiment que ce sera vrai dans ce cas-ci et dans toutes les autres situations —, c’est de mener des études plus rigoureuses et moins partisanes. C’est ce qui nous démarque et j’espère que nous poursuivrons cette honorable tradition.

En réponse à votre deuxième question, je n’ai jamais dit que le Sénat devait s’en faire parce que le gouvernement est minoritaire. Nous le savons, les gouvernements minoritaires sont fréquents dans le système parlementaire canadien. La vérité, c’est que, en contexte de minorité, le gouvernement n’a pas le contrôle exclusif de la situation. Le gouvernement doit se trouver un partenaire non seulement pour faire adopter les projets de loi, mais aussi pour leur faire franchir l’étape de la deuxième lecture, pendant laquelle l’opposition fait souvent de l’obstruction et joue son rôle comme elle l’entend d’étape en étape.

Ceux parmi vous qui ont siégé à l’autre endroit et qui en connaissent les règles savent que ces dernières diffèrent des nôtres. Les affaires ne sont pas menées aussi rondement et efficacement qu’ici.

(1530)

Enfin, lorsque le gouvernement est minoritaire, il y a des journées de l’opposition. La Chambre des communes consacre chaque mois des journées entières aux programmes, motions et priorités de l’opposition.

Tout cela mis ensemble peut être satisfaisant d’un point de vue partisan. En outre, si l’on s’attarde aux principes, on peut avoir l’impression que c’est la faute du gouvernement si les choses ne progressent pas aussi rapidement que dans un contexte majoritaire, surtout si le gouvernement majoritaire ne se gêne pas pour recourir à la clôture. Toutefois, la réalité, c’est que nous n’avons aucun contrôle sur ce qui se passe à l’autre endroit. Nous pouvons uniquement faire de notre mieux pour faire notre travail comme bon nous semble.

Je le répète, nous avons les outils pour nous appliquer et mettre à profit le talent et les ressources de notre comité afin d’examiner à fond cet important projet de loi de sorte que, lorsque le Sénat en sera saisi, notre contribution à son étude soit de plus grande valeur et effectuée de manière responsable, sans trop être entravée par les contraintes de temps et la capacité restreinte du comité.

L’honorable David Richards : Sénateur Gold, accepteriez-vous de répondre à une question, je vous prie?

Le sénateur Gold : Je vais répondre à toutes les questions que je peux.

Le sénateur Richards : Merci.

Je crois que l’expérience du projet de loi C-69 en dit long sur l’opinion de l’autre endroit à l’égard des amendements que le Sénat propose d’apporter aux projets de loi. Je crains que cette étude préalable ne procure au projet de loi une légitimité qu’il ne mérite pas. S’il reprend essentiellement ce que proposait le projet de loi C-10, qui détermine ce qui constitue un contenu canadien? Il y aura toujours des gardiens qui estiment savoir ce qui constitue les priorités identitaires, ce qui, en soi, est dangereux pour quiconque croit à l’indépendance artistique. Je crois entièrement à l’indépendance artistique et je crois que les gardiens seront toujours là. Ce projet de loi appuie non pas une véritable indépendance, mais les gardiens qui déterminent ce qui constitue du contenu canadien. Pourriez-vous répondre à cela, cher monsieur?

Son Honneur le Président : Avant que vous répondiez, sénateur Gold, je rappelle aux honorables sénateurs que nous débattons de la motion no 42, visant à déterminer si nous procèderons à une étude préalable. Nous ne débattons pas du contenu du projet de loi C-11. Nous avons une certaine latitude quant aux questions posées, mais je vous laisse le soin d’en juger, sénateur Gold.

Le sénateur Richards : Je suis désolé, Votre Honneur.

Le sénateur Gold : Sénateur Richards, nous débattons au sujet d’une étude préalable. Vos préoccupations sont légitimes. Je pense que tous les sénateurs attendent avec impatience vos contributions, tant au comité que pendant le débat.

L’honorable Leo Housakos : Sénateur Gold, j’ai écouté attentivement vos arguments en faveur d’une étude préalable du projet de loi C-11. Je suis convaincu que cette idée ne vient pas de vous, car je sais que vous êtes un homme raisonnable.

Les études préalables du Sénat ne sont pas un outil auquel on peut recourir à la légère. Nous pouvons y avoir recours lorsque la population a des besoins urgents ou qu’il s’agit d’un enjeu d’intérêt public urgent. Je n’ai pas entendu, dans vos propos, d’arguments convaincants selon lesquels le projet de loi C-11 répondrait à un enjeu d’intérêt public urgent.

D’après ma compréhension et mes souvenirs, le gouvernement a reçu un mandat à l’automne 2021. Il a rappelé le Parlement avant la fin de 2021, et ce n’est qu’à la fin de février qu’il a déposé à la Chambre des communes ce projet de loi qui porterait sur un enjeu d’intérêt public urgent.

Rappelons aussi que le gouvernement a essentiellement une majorité parlementaire à la Chambre depuis quelque temps. Par conséquent, s’il s’agissait d’un projet de loi vraiment urgent, la Chambre s’en serait occupée très rapidement.

Par le passé, lorsque nous avons effectué des études préalables, elles portaient généralement sur des projets de loi de crédits, ou bien c’était dans le cadre d’une crise, à un moment où il fallait débloquer rapidement des fonds pour répondre à un besoin urgent de la population. Dans de telles situations, le gouvernement se montre convaincant et, en général, les deux Chambres acceptent, assument leurs responsabilités et utilisent cet outil qu’est l’étude préalable.

Le gouvernement est au pouvoir depuis sept ans, il a eu un gouvernement majoritaire pendant quatre ans et demi. Il n’a pas proposé de projet de loi sur les télécommunications avant l’automne 2020. Aujourd’hui, il propose ce projet de loi en sachant très bien que nous n’aurons pas le temps de l’étudier de la façon dont nous le souhaiterions, comme nous l’avions indiqué à l’issue du dernier débat à ce sujet.

Nous étions tous parvenus au consensus que nous devions étudier en profondeur ce projet de loi en prenant le temps nécessaire. Il s’agit d’un projet de loi controversé qui ravit autant de secteurs qu’il n’en déçoit. Il est donc nécessaire que nous ayons des discussions rigoureuses qui tiennent compte de tous les aspects de ce projet de loi.

J’aimerais préciser qu’il ne nous reste que trois ou quatre semaines à siéger. Nous ne connaissons que trop bien les difficultés que nous avons en matière de ressources et de capacités pour que nos comités puissent siéger davantage qu’ils ne le font à l’heure actuelle. Par conséquent, ma question est la suivante. Sachant que ce projet de loi est très loin de faire l’unanimité parmi les parties concernées de notre société, pensez-vous que le gouvernement pourra — avec ou sans étude préalable — faire adopter ce projet de loi à la Chambre et au Sénat avant l’ajournement estival?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question.

Je ne répéterai pas ce que j’ai déjà dit, car je sais que d’autres attendent pour me poser des questions. J’informe le Sénat que je vais continuer à répondre aux questions, mais pas jusqu’à 16 heures.

Je ne répéterai pas ce que j’ai déjà dit. Je crois qu’il s’agit d’une priorité du gouvernement, qui a le droit de mettre en avant ses priorités et ses objectifs. À mon avis, une étude préalable constitue un outil raisonnable dont nous disposons pour faire le travail pour lequel on nous a nommés.

En ce qui concerne l’autre question à propos du temps qu’il pourrait rester à la session, nous allons un peu vite en besogne. Nous sommes ici pour débattre d’une étude préalable et pas de la voie que devrait suivre ce projet de loi.

Le sénateur Housakos : Sénateur Gold, j’aimerais obtenir une réponse plus précise. Dans le temps qu’il nous reste avant que nous ajournions pour l’été, qu’il y ait une étude préalable ou non et après avoir entendu durant la dernière session parlementaire que ce projet de loi exigeait un examen approfondi — ce dont ont convenu de multiples sénateurs —, croyez-vous que l’on s’attend à ce que nous nous acquittions de cette tâche dans le peu de temps qu’il reste?

J’ai une dernière question pour ajouter au débat : pouvez-vous nous expliquer clairement pourquoi la population a immédiatement besoin que ce projet de loi soit adopté aussi rapidement, au point où il faut une étude préalable?

Le sénateur Gold : Merci.

Pour répondre à votre première question, sénateur Housakos, il reste à voir ce qui ressortira de notre étude préalable. Il faudra aussi voir ce que contiendra le projet de loi une fois qu’il nous sera renvoyé. Que les préoccupations exprimées tiennent encore debout ou non, je m’attends pleinement à ce que les manœuvres politiques au sujet du projet de loi se poursuivent. C’est naturel en politique. Cependant, le projet de loi a été modifié pour tenir compte des préoccupations exprimées.

Tant que nous ne nous mettons pas au travail et que nous n’étudions pas le projet de loi, je ne pourrais pas dire combien de temps il faudra au comité pour mener cette étude. C’est à ce moment-là que les leaders, comme le veut l’usage, se réuniront pour déterminer les prochaines étapes. Cela se produira une fois que nous saurons quand nous recevrons le projet de loi.

Quant à votre dernière question, encore une fois, j’ai exposé mon point de vue du mieux que je le pouvais dans mon intervention. Je ne me répéterai pas. Toutefois, je tiens à vous rappeler que notre identité est définie par le contenu que nous fournissent les nombreux groupes et membres créatifs de la société. Ce contenu n’est plus réservé comme autrefois à l’élite de Montréal ou de Toronto. Notre pays présente une grande diversité. La Loi sur la radiodiffusion, que le projet de loi C-11 cherche à moderniser, n’offre pas une place ou un espace suffisant à ceux qui représentent les communautés plus marginalisées de notre pays.

(1540)

Il s’agit de l’argent que les fournisseurs de contenu canadiens ne recevront pas tant que le projet de loi ne sera pas adopté. Il s’agit de créer l’espace nécessaire dans notre cadre réglementaire pour refléter la diversité de notre pays afin que le contenu et l’art canadiens représentent fidèlement qui nous sommes et ce qu’est devenu l’endroit où nous vivons. Malheureusement, la Loi sur la radiodiffusion accuse un très grand retard.

Son Honneur le Président : Honorables sénateurs, il y a encore un certain nombre de sénateurs qui veulent poser des questions. Selon la procédure, lorsque le Président se lève, les sénateurs doivent s’asseoir. Je vous invite à poser des questions brèves et précises sur le sujet à l’étude, soit la motion no 42.

L’honorable Jim Quinn : Sénateur Gold, indépendamment du résultat du vote au sujet de la tenue d’une étude préalable sur le projet de loi C-11 — et j’ajouterais sur le projet de loi C-13 —, accepteriez-vous de prendre des dispositions pour que les membres du Comité des transports et des communications et les membres du Comité des langues officielles reçoivent, au retour de la relâche de la semaine prochaine, un exemplaire des cahiers d’information technique et de tout autre document d’information fourni par le gouvernement dans le cadre de l’examen de la mesure législative? À mon avis, ce serait beaucoup plus utile qu’une séance d’information technique et une présentation PowerPoint. Si l’objectif principal d’une étude préalable est d’être informé, pourquoi le gouvernement ne fournirait-il pas cette information aux membres des comités, peu importe le résultat du vote sur la tenue des études en question?

Le sénateur Gold : Merci pour votre question. Je ne veux pas supposer de quelle façon vous avez l’intention de voter sur cette motion, sénateur Quinn.

Je m’informerai pour déterminer quels documents peuvent être fournis aux comités. Il est certainement permis à un comité, une fois qu’il a le mandat d’effectuer l’étude préalable d’un projet de loi, de demander ces documents aux responsables et au gouvernement, et mon bureau utilisera ses bons offices pour faciliter cela. Je ne peux pas vous donner de réponse définitive sur ce qu’il est approprié de communiquer à cette étape du processus.

Le sénateur Quinn : Sénateur Gold, vous avez mentionné, dans vos réponses à différentes questions, que les comités sont maîtres de leurs procédures. Appuieriez-vous un amendement à ces motions pour permettre à chacun des comités de décider quelle priorité ils accorderont à ces études préalables afin de mieux équilibrer leur charge de travail et de veiller à rester maîtres de leurs procédures, surtout puisqu’il est question d’études préalables et que le travail se poursuivra sans doute une fois les projets de loi adoptés par l’autre endroit?

Le sénateur Gold : Avec tout le respect que je vous dois, sénateur Quinn, un tel amendement n’est pas du tout nécessaire. Au Parlement, le principe directeur veut que les projets de loi du gouvernement reçoivent un traitement prioritaire. Nous avons un processus en place, avec les comités de sélection et d’administration, pour permettre l’attribution de sièges dans les comités et la priorisation de leurs travaux, et il revient au comité, une fois qu’il est saisi d’un mandat, de décider de l’organisation de ses travaux. Un tel amendement serait simplement inutile à cet égard. Le Sénat et les comités disposent de tous les outils dont ils ont besoin.

L’honorable Frances Lankin : Sénateur Gold, je vous remercie de votre discours fort intéressant. J’ai hâte d’entendre les autres discours, car j’ai ma propre analyse de ce qui se cache derrière l’opposition à ce qui est proposé. Je ne la partagerai pas, parce que je ne veux provoquer personne. Bien que je sois un peu déconcertée, je serai attentive.

Personnellement, je suis favorable à l’étude préalable et je crois que nous devrions l’entreprendre. Il s’agit d’un projet de loi très controversé, avec beaucoup de partisans et beaucoup de détracteurs. Il y a donc beaucoup à apprendre et à se remémorer.

Ma question est la suivante. Si l’étude préalable est terminée et que le projet de loi n’est pas arrivé ou qu’il arrive en retard, le Sénat vous a souvent exprimé ses préoccupations récemment concernant le manque de temps pour examiner les projets de loi. Selon moi, une étude préalable améliore la situation, mais elle ne résout pas le problème potentiel. J’aimerais que vous me donniez l’assurance que, si le comité estime que les amendements et d’autres choses à la Chambre des communes nous obligent à revenir sur certains aspects et que nous avons besoin de temps pour le faire, nous ne serons pas obligés de nous précipiter pour que tout soit terminé avant les vacances d’été.

Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question. Comme j’ai essayé de l’expliquer clairement dans mon discours, et comme la motion l’indique, il n’y a pas d’échéance pour déposer le rapport. Le but est d’atténuer toutes les inquiétudes ou — si j’ose dire — les soupçons selon lesquels il s’agirait d’un cheval de Troie qu’il faudra adopter à toute vitesse quand il arrivera à la dernière minute. Ce n’est pas l’intention du gouvernement. Bien au contraire.

Comme je l’ai mentionné dans mon discours, quand le projet de loi arrivera au Sénat, peu importe si l’étude préalable n’est pas terminée... Espérons qu’elle ne le sera pas, car cela voudra dire que le projet de loi arrivera plus tôt que tard, ce que nous souhaitons. Donc, quand le projet de loi arrivera au Sénat, peu importe si l’étude préalable est terminée ou non, il devra — à juste titre — faire l’objet d’un débat à l’étape de la deuxième lecture, puis il sera renvoyé à un comité; le comité décidera alors le temps dont il aura besoin pour l’étudier. Enfin, le projet de loi fera l’objet d’un débat à l’étape de la troisième lecture.

Comme je l’ai dit, sénatrice Lankin, je vous remercie de votre question. C’est aux leaders seuls qu’il revient de discuter de cette démarche et d’en déterminer les détails. Au bout du compte, le Sénat se prononcera sur le projet de loi et décidera le temps qui sera consacré aux étapes de la deuxième lecture, de l’étude en comité et de la troisième lecture, conformément aux règles de débats et autres directives applicables.

J’espère que cela répond à votre question.

L’honorable Dennis Glen Patterson : Sénateur Gold, vous avez attiré mon attention en nous disant aujourd’hui que la solution de rechange à l’étude préalable du projet de loi C-11 et d’un autre projet de loi tout aussi controversé dont vous avez donné avis est d’attendre et de ne rien faire. Sénateur Gold, vous savez que le temps consacré à l’étude en comité est très limité en raison des séances hybrides actuelles. Si je ne m’abuse, il y a environ deux douzaines de projets de loi d’intérêt public du Sénat qui doivent être étudiés par nos comités.

Au lieu d’attendre et de ne rien faire, pourquoi ne pas consacrer le temps précieux et rare de nos comités à étudier ces projets de loi d’intérêt public judicieux du Sénat comme ils méritent de l’être dans nos comités? Ne serait-ce pas là une solution de rechange très utile à l’attente et à l’inaction?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de la question. Je parlais de ne rien faire à l’égard de ce projet de loi, sénateur. Il est certain que j’ai le plus grand respect pour le Sénat, pour les projets de loi d’intérêt public et pour les études des sénateurs qui ne relèvent pas des affaires du gouvernement.

Cela dit, il est tout aussi vrai que notre principale obligation constitutionnelle est d’étudier les projets de loi d’initiative ministérielle, et c’est à cette fin que le Sénat a été créé, en 1867. C’est une réalité qui a été soulignée non seulement par moi, mais par nombre d’autres sénateurs, et cela se reflète d’ailleurs dans le fait que nous ayons décidé d’accorder la priorité aux projets de loi d’initiative ministérielle au moment de déterminer l’emploi du temps d’un comité, et à cet égard, les projets de loi d’initiative ministérielle et les projets de loi d’intérêt public se font concurrence.

Il est tout à fait juste de dire que les projets de loi d’initiative ministérielle sont prioritaires, et ce n’est pas pour dénigrer l’important travail des sénateurs et des comités à l’égard des projets de loi et des études d’intérêt public.

Le sénateur Patterson : Merci. Sénateur Gold, je reprends un peu la question du sénateur Quinn, mais vous venez de justifier l’étude préalable du projet de loi C-11 en disant que cela permettra aux membres du Comité sénatorial permanent des transports et des communications de mieux en comprendre le contenu. Une séance d’information ne permettrait-elle pas d’atteindre le même objectif en rejoignant l’ensemble des sénateurs, et pas seulement les membres du Comité des transports et des communications?

Le sénateur Gold : Merci de votre question, sénateur. J’ai souvent entendu à quel point il est important que les projets de loi fassent l’objet d’une étude appropriée à l’étape du comité et qu’on ne précipite pas les choses. Si je peux me permettre de paraphraser mes collègues de l’Est, je trouve plus qu’étrange que l’on considère qu’une séance d’information pourrait remplacer adéquatement le fait d’entendre des témoins, de leur poser des questions et de faire l’excellent travail des sénateurs et des comités sénatoriaux. En tout respect, non, je ne crois vraiment pas que ce serait aussi efficace, et je vous remercie de la question.

[Français]

L’honorable Claude Carignan : Ma question s’adresse au leader du gouvernement. Je crois que vous vous méprenez sur les pouvoirs historiques du Sénat. Le pouvoir du Sénat, ce n’est pas que d’adopter les projets de loi du gouvernement; le Sénat doit aussi tenir le gouvernement responsable de ses actions, faire des études et produire des rapports. En ce moment, compte tenu de la pandémie, les comités siègent une fois sur deux, comparativement à la méthode traditionnelle. Les plages horaires allouées aux comités ont été réduites de 50 %. Maintenant, on présente des projets de loi au Sénat avant qu’ils soient adoptés par la Chambre des communes, et cela nuit au travail des comités, qui sont censés enquêter pour tenir le gouvernement responsable. Croyez-vous vraiment que le seul rôle du Sénat est d’adopter les projets de loi du gouvernement?

(1550)

Le sénateur Gold : La réponse est non, parce que ce n’est pas ce que j’ai dit. J’ai dit que le rôle primaire et fondamental du Sénat est d’analyser les projets de loi du gouvernement et, à cet égard et pour ce qui est de cet aspect, de contribuer au processus législatif au Canada. Comme je l’ai expliqué, je ne nie pas et je ne nierai jamais l’importance du travail qui est effectué au sein des comités. Cependant, le fait qu’il faut donner la priorité aux affaires du gouvernement est reconnu par tous les sénateurs dans cette enceinte.

Le sénateur Carignan : Monsieur le leader, le travail du Sénat et des sénateurs n’est pas de faire un second examen objectif de mesures présentées par des fonctionnaires, mais bien d’étudier les projets de loi adoptés à la Chambre des communes et de nous assurer que les intérêts régionaux, et notamment ceux des minorités, sont respectés dans le contexte d’une étude approfondie. Le jugement de la Cour suprême sur le Sénat à cet égard est très clair. Pourquoi continuer de faire en sorte que le travail du Sénat se substitue au travail de la Chambre des communes?

Le sénateur Gold : Ce n’est pas le cas. Nous ne nous substituons pas à l’autre endroit, mais nous contribuons au travail parlementaire, comme nous l’avons fait à plusieurs reprises et comme je l’ai mentionné dans les statistiques que j’ai citées. Si votre argument tenait la route, avec tout le respect que je vous dois, monsieur le sénateur, nous ne ferions jamais d’études préalables; or, ce n’est pas le cas. J’insiste sur l’importance de cette étude préalable, qui permettra au Sénat de faire son travail de manière responsable.

[Traduction]

Le sénateur Plett : Sénateur Gold, vous avez passé un peu de temps aujourd’hui à nous assurer que nous, au Sénat, sommes maîtres de notre destin. Je pense que vous avez au moins fait allusion au fait que cette étude préalable était entièrement l’idée du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, avez-vous reçu des instructions de la part du leader du gouvernement de l’autre endroit pour que nous réalisions une étude préalable ou avez-vous reçu un échéancier du leader du gouvernement de l’autre endroit indiquant le moment où le gouvernement veut que nous ayons terminé et ce qu’il attend de nous?

Le sénateur Gold : Sénateur Plett, je ne divulguerai pas les conversations que j’ai eues avec mes collègues du Cabinet, de la même manière que je ne divulguerais pas les conversations que nous avons en tant que leaders. Les deux types de conversations doivent rester confidentiels.

Je suis ici pour proposer, à titre de représentant du gouvernement — et de sénateur — la motion dont vous êtes saisis. Je consulterai, comme je l’ai toujours fait, comme l’a fait mon prédécesseur, les leaders dès que nous saurons quand le projet de loi arrivera. C’est à ce moment-là que nous nous discuterons entre leaders, que nous tracerons la voie à suivre et que nous négocierons comme nous le faisons toujours. Les leaders présenteront le projet aux membres de leur groupe respectif. Nous finirons par trouver une voie à suivre d’une manière ou d’une autre, mais il est prématuré d’entamer cette discussion maintenant. Nous ne savons pas quand nous allons recevoir le projet de loi.

Le sénateur Plett : Je ne vous demande pas d’enfreindre les règles de confidentialité, mais vous avez tenu à laisser entendre que ce n’était pas l’autre endroit. Je pense que ma question est parfaitement légitime.

Je suis fier d’être membre du Parti conservateur du Canada. Je suis fier de faire partie d’un caucus national. Aujourd’hui, j’ai assisté à une réunion du caucus national. Je suis fier de faire partie de la direction du Parti conservateur du Canada. Je n’ai pas à m’excuser pour la collaboration. Ils ne nous disent pas quoi faire et nous ne leur disons pas quoi faire, mais nous parlons.

Vous avez fait beaucoup de commentaires qui laissaient entendre que c’était votre décision et non la leur. Si c’est le cas, ma question est très légitime et je vais la poser à nouveau : avez-vous été encouragé de quelque manière que ce soit par le leader à la Chambre à faire cela?

Le sénateur Gold : Sénateur Plett, en toute déférence, je suis heureux que vous soyez fier et je suis heureux que vous parliez à vos collègues. Je parle à mes collègues du gouvernement, que je représente.

Je maintiens ce que j’ai dit dans mon discours au sujet de la proposition dont vous êtes saisis. Certes, la décision de proposer une étude préalable en est une qui a été prise au bureau du représentant du gouvernement au Sénat. J’espère qu’elle recevra l’appui d’une majorité des sénateurs. Je pense que c’est ce que nous devons faire.

[Français]

Le sénateur Carignan : Monsieur le leader, j’aimerais vous citer le paragraphe 57 du Renvoi relatif à la réforme du Sénat de 2014, où figure une citation de la Cour suprême, qui se cite elle-même dans le Renvoi relatif à la Chambre haute. Le paragraphe 57 dit ce qui suit :

[...] « [e]n créant le Sénat de la manière prévue à l’Acte, il est évident qu’on voulait en faire un organisme tout à fait indépendant qui pourrait revoir avec impartialité les mesures adoptées par la Chambre des communes » [...]

Lorsque nous procédons à une étude préalable, ce ne sont pas des mesures adoptées par la Chambre des communes que nous étudions, mais des mesures rédigées par des fonctionnaires; or, ce n’est pas notre rôle. Vous avez parfaitement raison de dire que si nous suivons ma logique, qui est celle qui épouse les raisons fondamentales pour lesquelles le Sénat a été créé, nous ne ferions pas d’études préalables. Je suis tout à fait d’accord.

Le sénateur Gold : Malheureusement, je ne suis pas d’accord avec vous ni avec cette proposition. Cher collègue, vous connaissez le respect que j’ai pour la Cour suprême, pour nos juges et pour l’importance de cet arrêt. C’est très bien de citer une phrase du renvoi, mais je vous encourage à lire les débats qui traitent de la Confédération et tout ce qui a été écrit au sujet du Sénat. Je vous encourage également à réfléchir aux nombreux rôles que joue le Sénat.

Permettez-moi aussi de vous renvoyer au texte de notre Constitution de 1867. Pourquoi la Constitution accorde-t-elle au Sénat le même pouvoir législatif, sauf pour les projets de loi de crédits retenus par la Chambre des communes, si le seul rôle du Sénat est d’attendre d’être saisi d’un projet de loi? Depuis 1867, nous avons un pouvoir constitutionnel qui nous autorise à légiférer de notre propre initiative. Ce n’est pas si radical de dire — avec un projet de loi comme le projet de loi C-10, qui a été étudié en détail et bien débattu dans cette enceinte, car malgré le fait que nous n’avions pas terminé nos débats, il est arrivé au Sénat avec des modifications — que nous mettons la main à la pâte et que nous faisons le travail qui nous est imparti.

Le sénateur Carignan : Le seul rôle du Sénat, monsieur le leader, n’est pas d’attendre. Lorsque nous ne sommes pas saisis de projets de loi, le rôle traditionnel du Sénat est de faire des enquêtes, de la surveillance et de la vérification et de mener des études de fond sur toutes sortes de sujets. Les enquêtes servent à tenir le gouvernement responsable, parce que la seule Chambre de contre-pouvoir, le seul contre-pouvoir qui existe au Canada pour ce qui est du contenu d’un projet de loi, c’est le Sénat. Nous sommes les seuls à avoir ce pouvoir; même les juges n’ont pas de pouvoir sur le contenu d’un projet de loi. Ils ont un pouvoir quand un projet de loi va à l’encontre de la Constitution canadienne, mais pas dans les limites des champs de compétence du gouvernement fédéral. C’est là qu’est votre méprise sur le rôle du Sénat. Vous pensez que, parce que nous ne sommes pas saisis de projets de loi du gouvernement, nous n’avons rien à faire. Nous avons beaucoup à faire. Nous avons des enquêtes à faire, monsieur le leader.

Le sénateur Gold : Je me vois dans l’obligation de me répéter trop souvent. Lors de mon discours, j’ai cité plusieurs exemples d’études qui ont été effectuées sous des parlements précédents, y compris lorsque votre gouvernement était au pouvoir. Nous avons mené de nombreuses études préalables qui allaient bien au-delà des questions budgétaires. Je soutiens que je comprends très bien le rôle du Sénat. Ce dont nous sommes saisis ici, c’est une motion visant à nous accorder le temps et la possibilité d’utiliser les outils dont nous disposons, en vertu de nos règles, et de faire notre travail. Sur ce, je m’en tiendrai à cette déclaration.

(À 16 heures, conformément à l’ordre adopté par le Sénat le 5 mai 2022, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

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